Violence de l’annonce, nuance de l’accompagnement

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Date de rédaction :
23 novembre 2012

« L’accompagnement substitue à la violence de l’annonce la nuance de l’énonciation, car elle privilégie l’écoute », écrit le neurologue Roger Gil. « Même une fois dit, le mot qui désigne la maladie peut blesser et il doit être utilisé avec circonspection, en laissant le malade décider de son utilisation. Des phrases dites au malade comme « Votre Alzheimer est stable » sont au mieux inutiles. Mais cet accompagnement s’appuie en fait non pas seulement sur le couple équipe soignante-soigné, mais sur la relation triangulaire équipe soignante, soigné et proches au sein desquels celui ou celle qui vit avec le malade aura bien sûr une place privilégiée. Ils bénéficient d’informations précises sur la démarche diagnostique. Mais il importe aujourd’hui de savoir que la prise en charge de la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer ne peut se faire sans témoigner aux proches et à l’aidant principal attention et disponibilité. La qualité de vie du malade va dépendre en grande partie de la présence de l’aidant dont il faudra veiller à ce qu’il ne sombre pas dans l’épuisement, à ce qu’il ne néglige pas sa propre santé, à ce qu’il n’aille pas au-delà de ses forces ».  Et au-delà du diagnostic ? « Quelles sont les conséquences des troubles présentés par le malade non pas au seul niveau de son architecture neuropsychologique cognitive, mais au niveau de sa personne ? », interroge Roger Gil. « Ceci suppose d’abord de sortir d’une vision étriquée de la neuropsychologie qui ne doit plus se limiter à décliner l’atteinte de secteurs de la cognition. Elle se doit aussi d’inventorier les troubles émotionnels et comportementaux, ainsi que la cognition sociale, qui désigne l’ensemble des compétences et des expériences cognitivo-émotionnelles régissant les relations et rendant compte des comportements de l’être humain avec son entourage familial et social. La nature même de l’être humain est en effet d’âtre en relation avec un environnement qui est d’abord un environnement humain. Les fonctions cognitives et émotionnelles qu’explore la neuropsychologie permettent à l’être humain de se penser et de penser les autres, d’être ému et d’émouvoir les autres, d’être en soi et d’être au monde. Et c’est pourquoi l’examen neuropsychologique est porté plus loin que lui : au-delà de ce qu’il vise initialement, c’est-à-dire le diagnostic d’une maladie, il rencontre une humanité blessée dans les compétences mêmes qui lui permettent de se dire et de se construire, c’est-à-dire son identité ».

Gil R. Vieillissement et Alzheimer – Comprendre pour accompagner. Novembre 2012. Paris : L’Harmattan. 136 p. ISBN 978-2-336-00294-1. www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=38494.