Témoignage joyeux (1)
Société inclusive
Colette Roumanoff est la mère de l’humoriste Anne Roumanoff et l’épouse de Daniel, atteint de la maladie d’Alzheimer depuis 2006. Depuis, elle dénonce les tests médicaux « qui comptabilisent les déficits et jamais les ressources », et une société qui stigmatise les malades au lieu de les encourager. Agnès Duperrin, journaliste à Notre Temps, l’interroge : « faire rimer Alzheimer et bonheur, c’est possible ? » Colette Roumanoff répond : « oui, mais sans doute pas donné à tout le monde. Si on ne modifie pas sa manière de vivre, si l’aidant passe son temps à se scandaliser de ce qu’il voit et de ce qu’il entend, s’il reproche au malade sa maladie, c’est mission impossible. Il faut mettre en place dès le début les bonnes attitudes. » Comprendre la personne malade n’est pas toujours facile : « c’est vrai, il faut de l’imagination, de l’attention… Je remarque au restaurant que Daniel ne cesse de se regarder dans un miroir, il se trouve sympathique. Le lendemain j’en installe plusieurs chez moi : je viens de comprendre que cela l’aide à ne pas se perdre lui-même ! Il a rangé le grille-pain dans le frigo ? Il y a toujours une logique – une couleur, une forme, un élément commun – qui explique la confusion. Il considère sans doute que le frigo est un meuble comme un autre. Ce n’est pas grave ! Surtout, évitons de nous projeter dans l’autre. Il faut prendre la personne comme elle est, sans dramatiser. Cela demande une démarche originale, car notre société cruelle ne nous prépare pas du tout à nous intéresser au sort des autres. Elle nous dit : “Débarrassez-vous de ces malades impossibles dans des structures appropriées, et si vous avez un sentiment de culpabilité, allez voir un psy.” Nous, nous avons de beaux moments ensemble. Notre secret, c’est : “pas de regret, pas d’inquiétude”! »
www.notretemps.com, 5 juin 2013.