Succession : les enfants qui viennent en aide à leur parent ont-ils droit à une compensation ?

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
26 avril 2016

« En principe, cela est exclu », explique Me Hélène Courtonne, notaire. « Les enfants sont tenus au respect d’une obligation alimentaire. Mais si le parent n’est pas dans le besoin ou si l’enfant a assumé seul leur charge, des solutions sont envisageables. L’enfant qui en a les moyens peut par exemple prêter de l’argent à son père ou à sa mère. Puis, en faisant enregistrer l’acte au service des impôts, il a l’assurance d’être remboursé sur la succession si celle-ci présente un actif. Mieux vaut être transparent vis-à-vis des frères et sœurs. » Quand l’aide au parent âgé dépasse le cadre de l’obligation alimentaire, il est possible de prévoir des contreparties par le biais d’une donation avec charge : « je te donne mon appartement, et tu t’engages à prendre soin de moi jusqu’au bout en préparant mes repas, en t’occupant de ma toilette et de mes courses » est l’exemple d’un accord passé entre parent et enfant, juridiquement matérialisable. Il s’agit d’une donation avec charge ou avec conditions, explique Barbara Bénichou, de Conseils des notaires. « Les conditions ou charges impossibles, illicites ou contraire aux bonnes mœurs sont interdites. Il est donc impossible d’imposer une obligation dont l’exécution dépend de la seule volonté du donateur ou limite la liberté du donataire. Tel est le cas d’une clause qui exigerait du donataire qu’il reste célibataire ou qu’il épouse exclusivement une personne de la même religion que lui. De la même façon, le donateur ne peut prévoir une clause de paiement de ses dettes futures. La loi prévoit qu’en présence de telles clauses, ces dernières sont annulées de plein droit : de donataire peut donc conserver le bien sans obligation. » 

Un enfant qui se dévoue pour ses parents davantage que ses frères et sœurs peut-il le faire valoir lors de la succession ? Oui, répond Me Jacques Combret, notaire honoraire. « Il est susceptible de réclamer en justice ce que l’on appelle une “créance d’assistance” au décès du parent, si son aide a dépassé « le devoir de piété filiale ». Cette créance est une création jurisprudentielle datant de 1994, mais toujours confirmée depuis. Elle concerne par exemple un enfant qui aurait pris un congé sabbatique ou réduit son temps de travail pour subvenir aux besoins de son parent : courses, préparation des repas, organisation des soins… permettant ainsi le maintien à domicile. Lors de leur congrès de Marseille en 1999, les notaires avaient émis une proposition pour légaliser cette notion, un souhait resté sans succès à ce jour. Ainsi, curieusement, on peut obtenir une créance d’assistance par voie judiciaire, mais pas à l’amiable. »

Conseils des notaires 2016 ; hors-série n°5 –Alzheimer et dépendance. Mai 2016.