S’effacer

Société inclusive

Date de rédaction :
21 mai 2012

« Je suis toujours Richard, je suis toujours un être humain, je continue à vivre avec les symptômes de la démence, probablement de type Alzheimer », répète inlassablement Richard Taylor, docteur en psychologie. « J’ai pensé à l’effacement (fading away), ce que je ressens en ce moment et qui n’est pas une surprise.  Cela signifie surtout perdre les contacts que j’ai autrefois nourris et chéris (nurtured and treasured), et maintenant que je n’ai plus l’attention, le dynamisme (drive), la capacité à rester en contact, je sens que je me détache progressivement des autres, et eux de moi. Rester en contact demande beaucoup d’énergie. Beaucoup de temps. Beaucoup d’attention ininterrompue. Je sais que beaucoup d’autres sont là quand j’ai besoin d’eux, mais mon degré de besoin, ma fréquence de besoin s’est accrue et les autres semblent ne pas s’en rendre compte, ou du moins ne font rien pour cela. Au début, au milieu et à la fin, ce qui compte réellement est la façon dont les gens se comportent. Lorsque mon attention et ma capacité à rester en contact chutent, mon « niveau d’entretien » (maintenance level) augmente. Il a besoin de s’ajuster, et cet ajustement doit surtout venir des autres. Je ne peux pas le faire comme avant. Ma plasticité est devenue plus cassante, plus sensible (more brittle, more sensitive). Parfois, je parle directement aux autres, mais le plus souvent, je pleure la perte (mourn the loss) en privé. Nous pouvons débattre : dois-je être responsable de chacune de mes pesées, de chacun de mes sentiments ? Je vous le dis de mon point de vue : je pense que cela devrait être toujours vrai, mais ce n’est plus le cas. J’ai besoin d’aide ! Une aide que je ne peux pas toujours décrire, que je ne connais pas toujours, et je me rends compte que souvent, je suis mon pire ennemi. Je peux réellement ressentir la force du repli sur moi (the pull of withdrawing) ». 

Alzheimer From The Inside Out, juin 2012.