Reste à charge en établissement : faire payer davantage ceux qui en ont les moyens ?

Droit des personnes malades

Date de rédaction :
12 mai 2016

Sur l’ensemble des résidents en EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), seuls 20% bénéficient de l’aide sociale à l’hébergement, alors que 76% des places sont habilitées. Ces places habilitées à l’aide sociale sont peu occupées par des résidents aux revenus très faibles, rappelle Nadia Graradji, de Géroscopie. Si la modulation des tarifs existe déjà dans le secteur des crèches ou du logement social, est-ce l’une des solutions à envisager pour réduire le reste à charge des personnes âgées en EHPAD ? s’interroge Nadia Graradji. « Ce scénario divise et irrite encore. » Ainsi, Jean-Marc Borello, président du Groupe SOS,gestionnaire d’une cinquantaine d’EHPAD, a institué des « loyers différenciés » en fonction des revenus des résidents : un tarif « aide sociale » pour les plus nécessiteux et un « surloyer » à ceux qui en ont les moyens. Cette solution était préconisée par l’Assemblée des départements de France (ADF) dès 2011 pour trouver un point d’équilibre entre la « mixité sociale » et la « solidarité entre résidents » : « ces places d’un très bon rapport qualité-prix sont parfois occupées, du fait d’un réseau relationnel, par des personnes ne relevant pas de l’aide sociale.» La Cour des comptes, dans un référé de 2014, écrivait : « la régulation administrative des tarifs, qui passe par la fixation de prix de journée d’hébergement généralement plus faibles que dans les structures non habilitées, génère des effets d’aubaine pour les non-bénéficiaires de l’aide sociale, particulièrement dans les EHPAD où les bénéficiaires de l’aide sociale sont minoritaires. » La FNAPAEF (Fédération nationale des associations et des amis des personnes âgées et de leurs familles) est opposée à cette idée de modulation des tarifs d’hébergement, qui, selon elle, « conduirait à libéraliser et à aligner les tarifs hébergement des établissements publics et associatifs à but non lucratif sur les tarifs hébergement pratiqués par les établissements privés commerciaux. » Le Conseil départemental du Nord y voit au contraire une solution pour « redonner des marges de manœuvre au plan financier » aux établissements, mais sous la contrainte : « les EHPAD qui refusent de descendre au-dessous de 50% de places habilitées à l’aide sociale verront leur dotation hébergement pour 2016 réduite de 3%. Plus de vingt-cinq établissements du Nord ont fait le choix de passer en déshabilitation partielle. Mais attention, prévient l’ADF : « en cas de discrimination négative des admissions au détriment des bénéficiaires de l’aide sociale, la modulation tarifaire doit être supprimée et les subventions des autorités publiques reversées. »

Géroscopie pour les décideurs en gérontologie, mai 2016.