Repas sans fourchette

Société inclusive

Date de rédaction :
16 juillet 2013

Une fois par mois, les résidents de la maison de retraite des Terres rouges d’Aubagne (Bouches-du-Rhône), qu’ils soient atteints de la maladie d’Alzheimer (la moitié des résidents) ou non, ainsi que leurs proches, sont conviés à partager un repas prévu pour être mangé avec les mains, mais uniquement s’ils le désirent. Une opération qui a pour l’instant fait ses preuves. « Les repas étaient perçus comme des moments de stress », explique Michel Bourgoin, médecin coordinateur à la maison de retraite. « Les premières fonctions à disparaître chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont les fonctions extérieures, organisationnelles par exemple. Ensuite ce sont les fonctions praxiques, celles qui nous permettent d’utiliser des objets. Les fonctions “instinctuelles”, comme manger avec les mains sont les dernières atteintes”. Ainsi, non seulement les repas sont des moments plus conviviaux, ce qui est l’un des buts recherchés, mais les personnes malades s’alimentent plus volontiers, et mangent donc plus. « Il y a eu un moment de flottement au début. Les pensionnaires se demandaient si c’était permis », raconte Michel Bourgoin. « On sentait qu’il y avait un léger malaise même s’ils ne savaient pas comment l’exprimer », renchérit la directrice Marie-Françoise Clampin. Mais une fois les premiers moments de gêne passés, l’opération a très vite bien fonctionné. Devant la réussite de l’opération, les Terres rouges envisagent d’organiser des repas sans fourchette à un rythme hebdomadaire. La maison de retraite cherche par ailleurs à développer le concept auprès de restaurants à proximité, entreprise pour l’instant sans succès. Pourtant, en plus de l’aspect thérapeutique des repas sans fourchette, il s’agit d’un travail culinaire à part entière. « Ce n’est pas particulièrement compliqué dans l’exécution, mais cela nécessite d’effectuer beaucoup de recherches », explique Barbara Desmero, la cuisinière. Au dernier repas mensuel sans fourchette, avant que les plats ne soient servis, une des pensionnaires s’étonnait encore de cette initiative. « Oui mais pendant la guerre, on mangeait sans aliments, c’était nettement plus difficile », lui a répondu sa voisine de table.