Protection des majeurs : la règle de la préférence familiale
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« La Cour de cassation fait preuve d’une grande vigilance quant au respect de la règle de préférence familiale posée par le Code civil en ce qui concerne la protection juridique des majeurs, qui est parfois, mais pas toujours, méconnue par les juges du fond », observe Jacques Massip, conseiller doyen honoraire à la Cour de cassation. Il rappelle que la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs a réaffirmé la prééminence de la tutelle familiale et a instauré, dans les nouveaux articles 448 à 451 du Code civil, un certain nombre de règles que le juge des tutelles est tenu de respecter pour le choix du tuteur ou du curateur. Il doit d’abord tenir compte de la désignation faite par le majeur protégé lui-même dans les formes prévues par le Code de procédure civile ou même des simples sentiments exprimés par ce dernier. À défaut, il doit nommer le conjoint de la personne protégée ou ceux qui lui sont assimilés (partenaire pacsé ou simple concubin), ensuite ses parents et alliés ou une personne résidant avec le majeur protégé et entretenant avec lui des liens étroits et stables. Ce n’est que lorsqu’aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut être désigné que le juge peut nommer un mandataire judiciaire à la protection des majeurs. La Cour de cassation s’est toujours attachée à faire respecter le principe de la préférence familiale. En revanche, estime le magistrat, « les juges du fond [tribunaux de première et deuxième instance] n’ont pas toujours les mêmes préoccupations et ont parfois tendance à recourir aux services de mandataires judiciaires. C’est souvent, en effet, une solution de facilité, car ces professionnels tiendront une comptabilité précise qui pourra être contrôlée aisément par le greffier en chef du tribunal d’instance, alors que les tuteurs ou curateurs familiaux ont parfois de la difficulté pour établir un compte annuel de gestion, remplir des formulaires parfois compliqués et fournir des justifications détaillées de leurs activités. » Pour Jacques Massip, « il serait incontestablement souhaitable, si l’on veut promouvoir les tutelles familiales, d’alléger les obligations des personnes qui acceptent la lourde charge de s’occuper de leurs proches dont les facultés sont altérées. Déjà, l’article 512 du Code civil permet au juge de dispenser le tuteur (ou le curateur en cas de tutelle renforcée) d’établir un compte annuel de gestion, et il serait opportun que diverses mesures concrètes soient mises en place dans les ordonnances de simplification du droit qui sont envisagées. »
Massip J. La règle de la préférence familiale en matière de protection des majeurs et son contrôle par la Cour de cassation. Gaz Palais 2014 ; 351-352 : 9-10. 17-18 décembre 2014.