Peurs
Société inclusive
Comment se sent-il aujourd’hui ? Richard Taylor est sombre : « ce qui se passe entre mes oreilles semble être fonction de ma capacité réduite à la fois à rester concentré et à me rappeler avec précision des détails de ma vie. Parce que mes souvenirs ne sont pas assez précis, comprendre certaines choses (figuring things out) est devenu problématique. J’ai quelques idées sur ce qu’il faut faire, comment régler telle ou telle question, mais ces idées ont une demi-vie de plus en plus courte pour qu’elles soient efficaces. De plus, savoir quoi faire ou savoir ce qui se passe devient de plus en plus confus pour moi. Je n’aime pas ça. J’ai de plus en plus peur de ce que l’avenir me réserve. Dans mes moments les plus sombres, il m’arrive de souhaiter tomber rapidement dans le monde éteint ou ennuyeux (dulled/dulling world) dont je devine qu’il doit être le lot de nombreuses personnes au stade le plus profond (deepest) de la démence. Je suis à court de détours et de camouflages (running out of work arounds, cover-ups) pour mes fonctions cognitives qui m’échappent (slipping). Souvent, je n’en suis même pas conscient, ce sont les autres qui me le disent une fois que c’est arrivé. Et pour corser le tout, je deviens de plus en plus défensif lorsque les autres essaient de façon bien intentionnée de m’aider à comprendre telle ou telle chose. Cette situation est terrible pour moi, elle est affreuse pour ceux qui essaient de me soutenir et de me rendre capable de faire des choses (support and enable me). « Je pense, donc je suis » : oui, j’y crois. Néanmoins, simplement savoir qui je suis devient de plus en plus flou et inatteignable (increasingly unclear and unavailable to me), et cela déclenche en moi un grand nombre de peurs ».
Alzheimer’s from the inside out. Reports from between the ears and from the heart of Richard Taylor, a person living with the symptoms of dementia. Septembre 2011.