Perturbations du goût et de l’odorat (1)
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Pour Monique Ferry, gériatre et nutritionniste à l’Espace prévention senior, Valence/ INSERM U557 (Université Paris XIII), « le goût et l’odorat sont des facteurs essentiels de la régulation de l’appétit, dont on oublie trop souvent l’évaluation chez les sujets âgés. L’évocation des différentes causes de perturbation du goût permet de le préserver au maximum chez le sujet âgé pour lutter contre l’anorexie et donc la malnutrition. Le goût est un phénomène complexe, à la fois physiologique, psychologique et culturel : le goût sucré est inné, les autres saveurs sont acquises par l’éducation et l’expérience. Aux quatre saveurs fondamentales (sucrée, salée, acide, amère) connues en Europe, les chercheurs ajoutent désormais la saveur umami (sensation durable et appétissante recouvrant toute la langue, procurée par les récepteurs du glutamate, largement utilisé comme exhausteur de goût dans la cuisine d’Extrême Orient depuis les travaux du chimiste japonais Kikunae Ikeda en 1936). Le vieillissement entraîne des modifications du goût et de l’odorat, notamment celle du plaisir perçu au cours de l’acte alimentaire. Le seuil de détection des quatre sensations de base du goût est augmenté (hypogueusies). Le sujet âgé a une appétence relative pour le sucré et un rejet relatif pour le salé. Certaines saveurs ne sont plus reconnues (dysgueusies). L’odorat est davantage affecté que le goût, les femmes plus tardivement que les hommes, les odeurs volatiles plus tôt que les odeurs alimentaires ; 10 à 15% des personnes âgées de quatre-vingts ans sont totalement anosmiques (elles ne perçoivent plus aucune odeur). La capacité de perception des changements de concentration et de discrimination des odeurs peut mettre en danger la personne âgée, si elle ne réagit pas à une odeur de gaz ou de brulé. La stimulation olfactive de l’appétit est moins grande. Les médicaments, la déshydratation, la malnutrition, l’altération de la muqueuse buccale, des facteurs neurologiques (notamment des lésions de nerfs crâniens, un accident vasculaire cérébral, la maladie d’Alzheimer dès le stade très précoce, la maladie de Parkinson) ou pathologiques (notamment les affections ORL chroniques ou les cancers).
Ferry M. Les perturbations du goût. Journal du médecin coordonnateur 2012 ; 49 : 16-18. Octobre-décembre 2012.