Mots d’esprit
Société inclusive
« Les mots et les jeux de mots des personnes atteintes de démence sont des dentelles fragiles d’un tissage relationnel toujours en construction », écrivent Véronique Lefebvre des Noëttes, psychiatre du sujet âgé et Isabelle Fionseca, gériatre à l’unité cognitivo-comportementale du centre hospitalier Émile-Roux à Limeil-Brévannes. « Ils sont une trace toujours vivante d’une volonté d’être au monde et de communiquer, et une prouesse de l’esprit qui, malgré un langage oral et écrit amputé, est capable d’un néo-langage, d’un sens de la répartie et d’une construction poétique drôle et vivante. » « Vous, vous êtes un drôle de printemps, dit Camille, les yeux rieurs. « Ce matin, le printemps poudre de papillon », dit Victorine, qui touche son pendentif en forme de papillon. « Le soleil pleure avant la nuit », dit Yvette, apercevant le soleil couchant de son lit d’hôpital. « La pluie même mouillée est chaude ici », dit Clémence, les pieds dans une mare d’urine. « Votre sourire, ça remplace les rayons du soleil, c’est chaud, c’est bien quand on a les dents écartées, ça porte chance… Et moi, je n’ai plus de dents, alors j’ai beaucoup de chance », dit Robert, dont le visage se fend d’un sourire d’ange.
Lefebvre des Noëttes V et Fonseca I. Quelles sont les traces d’esprit dans un corps qui se délite chez les personnes atteintes de maladie d’Alzheimer ? Neurologie Psychiatrie Gériatrie 205 ; 15(88) : 236-243. Août 2015.
www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1627483015000355.