Métiers de la gérontologie : nouveaux champs, nouvelles perspectives, de la Fondation nationale de gérontologie (5)
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Françoise Le Borgne-Uguen et Simone Pennec, de l’Atelier de recherche sociologique de l’Université de Bretagne occidentale à Brest, analysent les mutations de l’offre de formation dans le domaine du vieillissement, la pédagogie et les publics d’étudiants depuis trente-cinq ans. « Définie au départ dans le cadre de la formation continue, la démarche pédagogique et scientifique allie les principes de l’éducation permanente, de la recherche-action coopérative et la visée d’une université ouverte sur différents publics et territoires. L’intégration d’étudiants de formation initiale influe dorénavant sur la mise en œuvre des orientations pédagogiques. La multiplication des masters professionnels conduit à des concurrences jouant sur la visibilité des compétences, des certifications professionnelles et des emplois ». Pour les auteurs, par rapport au Québec, au Brésil, à la Suisse et dans les pays anglo-saxons, « une spécificité française tient à la plus faible reconnaissance des formations pluridisciplinaires en sciences sociales dans le champ universitaire ». Dans ces pays, « l’alliance entre disciplines a été mise à l’épreuve avec succès dans les écoles du travail social et des soins infirmiers. Ces parcours sont inscrits à part entière comme départements universitaires. Ils valident des doctorats de sciences de travail social, de sciences infirmières et de gérontologie, et développent la promotion de recherches et la définition de métiers dans ces filières.
En France, l’importance de la question du vieillissement comme champ de recherche en sociologie contraste avec une reconnaissance toujours à conquérir dans le paysage institutionnel. Les pouvoirs du médical, plus récemment de la gestion et de la technologie, tiennent aussi au faible cours de la vieillesse et du vieillissement dans la doxa sociologique [ensemble des croyances et idées non objectives]. Si la vieillesse n’est qu’un mot, celle-ci peine à entrer en cours dans l’académie sociologique, alors que s’en saisissent l’histoire, la géographie et bien entendu la démographie ». Thibauld Moulaert, chargé de recherches du Fonds national de la recherche scientifique (FRS-FNRS) et chercheur à l’Institut d’analyse du changement dans l’histoire et les sociétés contemporaines (IACCHOS) à l’Université catholique de Louvain, constate que les francophones (québécois mis à part) préfèrent se définir comme sociologues du vieillissement plutôt que comme gérontologues ou gérontologues sociaux. Il suggère de « rompre avec la fausse opposition de l’engagement/distanciation du chercheur face au monde social et politique, qui distingue clairement les deux mondes francophones et anglophones », le Québec offrant un espace-frontière original.
Le Borgne-Uguen F et Pennec S. Réflexions à partir d’une expérience universitaire de formations en sciences sociales dans le domaine du vieillissement. Gérontologie et société 2012 ; 142 : 57-80. Septembre 2012. Moulaert T. Pourquoi les francophones préfèrent-ils la sociologie du vieillissement à la gérontologie critique ? Gérontologie et société 2012 ; 142 : 81-100. Septembre 2012.