Maladies neurodégénératives : la double piste microbienne et immunitaire

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Date de rédaction :
01 septembre 2017

On se souvient que la maladie « de la vache folle » (encéphalopathie spongiforme) se transmettait dans le système nerveux central via l’intestin, puis le système nerveux central, par l’intermédiaire d’une protéine toxique qui parvenait à remonter le circuit des neurones périphériques. La cause originelle de la maladie neurologique serait à rechercher non dans le cerveau, mais dans le tube digestif. Ce nouveau domaine scientifique, très complexe, est en émergence, mais les connaissances se consolident rapidement, et l’on dispose maintenant d’un mécanisme moléculaire et cellulaire cohérent. Toutefois, aucun lien de causalité n’est encore prouvé. L’hypothèse actuelle est que l’activation immunitaire dans les intestins par les protéines amyloïdes bactériennes entraîne une réaction immunitaire et une inflammation dans le cerveau, qui serait alors à l’origine de l’agrégation protéique cérébrale. Chez l’homme, l’équipe de Giovanni Frisoni et ses collègues, du laboratoire de neuroimagerie des hôpitaux universitaires de Genève (Suisse), ont identifié des souches de bactéries intestinales dont l’abondance relative est associée à une inflammation périphérique chez des personnes atteintes de déficit cognitif et d’amyloïdose cérébrale (Cattaneo A, janvier 2017). Francesco Girolamo, et ses collègues, du département des sciences médicales fondamentales, des neurosciences et des organes des sens de l’Université de Bari (Italie), proposent une synthèse des connaissances sur le sujet. Le modèle actuel est le suivant : 1/des cellules immunitaires spécialisées, les mastocytes, entretiennent l’inflammation du système nerveux central ; 2/la pénétration des antigènes provenant des microbes intestinaux dans les mastocytes régule la perméabilité intestinale, ce qui permet à des produits bactériens de passer dans le sang, puis à travers la barrière hémato-encéphalique ; 3/ des microbes spécifiques amplifient la réponse pro-inflammatoire des mastocytes ; 4/ le microbiote intestinal est différent chez les patients atteints de maladies neurologiques et chez les patients sains ; 5/ la modulation du microbiote intestinal et l’activation des mastocytes promeut la neuroprotection. Des facteurs environnementaux et les gènes individuels déterminent une susceptibilité à la neuro-inflammation et à la neuro-dégénérescence. « Le microbiote intestinal peut être modulé par le régime alimentaire ou des suppléments probiotiques [« micro-organismes vivants qui, lorsqu’ils sont ingérés en quantité suffisante, exercent des effets positifs sur la santé, au-delà des effets nutritionnels traditionnels », selon l’OMS, et l’activation des mastocytes modifiée par des médicaments », concluent les auteurs, « pour augmenter la neuroprotection et diminuer la neurotoxicité. »

Girolamo F et al. Immunoregulatory effect of mast cells influenced by microbes in neurodegenerative diseases. Brain Behav Immun 2017; 65: 68-89. Octobre 2017.

www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0889159117302064?via%3Dihub#ab005.

Cattaneo A et al. Association of brain amyloidosis with pro-inflammatory gut bacterial taxa and peripheral inflammation markers in cognitively impaired elderly. Neurobiol Aging 2017; 49: 60-68. Janvier 2017. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27776263.