Le béguinage comme réponse à la précarité chez les aînés

Société inclusive

Date de rédaction :
01 mars 2010

Longtemps, elles sont restées invisibles : les personnes âgées, par fierté, préféraient souffrir en silence ou ne ressentaient pas le besoin de pousser la porte des organisations caritatives. Mais selon Didier Piard, directeur de l’action sociale à la Croix-Rouge, leur nombre a triplé depuis deux ans : les retraités représentent maintenant 15% des personnes venant solliciter une aide alimentaire ou un soutien financier pour régler un loyer, une facture d’électricité ou de gaz. La situation est encore plus critique dans les zones rurales, explique le Secours populaire, qui suit 10% de personnes ayant une retraite comme principale source de revenus. Plusieurs facteurs se conjuguent pour conduire les aînés vers la précarité : la diminution du revenu à l’entrée en retraite, le décès du conjoint, un handicap ou une perte d’autonomie. Plus ou moins brutalement, la personne n’a plus les moyens de payer son loyer, ou d’entretenir, voire d’aménager le logement dont elle est propriétaire. Elle n’a pas non plus la possibilité financière d’aller en maison de retraite. L’association Habitat et humanisme, expérimente le « béguinage » : des formules de logement destinées essentiellement à des personnes âgées de quatre-vingt à quatre-vingt-dix ans, socialement fragilisées et peu à peu touchées par la dépendance. Carol Poméon, chargée de mission, explique : « on regroupe plusieurs logements à loyer modéré et on y installe des personnes âgées qui sont invitées à mutualiser leurs ressources. Elles paieront par exemple en commun une aide à domicile ou une personne qui leur fera les courses, un soutien qu’individuellement elles ne pourraient pas s’offrir ».
Selon les statistiques l’INSEE, 8.8% des femmes et 8.3% des hommes âgés de soixante à soixante-quatorze ans vivaient en 2007 au-dessous du seuil de pauvreté (60% du revenu médian, soit 908 euros pour une personne seule). Cette proportion passe à 14.3% pour les femmes et 8.9% pour les hommes après l’âge de soixante-quinze ans. Si la pauvreté des personnes âgées est bien moindre que celle des jeunes, explique Didier Gélot, directeur général de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES), cette tendance pourrait se modifier à l’avenir : « quelle pension de retraite peut bien toucher une personne qui a enchaîné CDD, travail à temps très partiel et périodes de chômage ? » , s’interroge-t-il.

La Croix, 17 février 2010.