La voix des patients est-elle encore trop inaudible ?
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
La dixième conférence internationale d’éthique clinique s’est tenue à Paris du 24 au 26 avril 2014, en partenariat avec la Mutualité française, sur le thème « la voix du patient ». « Douze ans après la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades, et en dépit des progrès accomplis en matière de démocratie sanitaire, les patients peinent encore trop souvent à se faire entendre, aussi bien au niveau individuel que collectif », écrit Sophie Lecerf, de l’Agence fédérale d’information mutualiste (AFIM). Etienne Caniard, président de la Mutualité française, regrette un manque d’éthique clinique pour accompagner l’évolution de la relation médecin-malade, avec pour conséquence une « absence d’échanges et de discussions, réduisant le débat à une sorte de rapport de force dommageable pour chacun ». Sophie Lecerf rappelle que « contrairement à l’éthique médicale, qui s’intéresse aux grands principes moraux qui doivent régir la médecine, l’objectif de l’éthique clinique est d’accompagner la prise en charge quotidienne des patients, en traitant au cas par cas les situations douloureuses, porteuses de tensions entre les équipes médicales et les patients ou leurs familles, et soulevant incertitudes, confusions et conflits de valeurs. »
Etienne Caniard pointe également « l’essoufflement et l’instrumentalisation des associations » : selon lui, la réflexion sur la place des représentants d’usagers n’a pas été suffisamment confrontée à l’expérience. « L’exemple de la Haute autorité de santé (HAS) est très révélateur : si la présence des usagers dans les commissions d’accréditation des établissements de santé ne pose aucun problème, le choix d’une présence systématique dans toutes les structures d’expertise, comme un groupe chargé d’actualiser l’état de la science, ne va pas de soi. » De plus, ce repli des associations d’usagers s’explique aussi, selon Etienne Caniard, en raison de la séparation des malades et des droits sociaux, « qui a affaibli les droits des premiers dans un contexte de crise économique durable. Il aurait fallu adjoindre un volet sur l’accès de tous aux soins dans la loi de 2002. » Alors que le texte de loi avait été porté « par la nécessité d’une plus grande reconnaissance du respect dû au malade en tant que personne à part entière », « la revendication s’est progressivement focalisée sur les nouveaux droits des associations, opposant trop facilement les droits des uns aux devoirs des autres, et réciproquement. » Pour rompre avec cette dynamique, Etienne Caniard suggère l’approche individuelle comme « principale source d’inspiration éthique permettant de fonder et de donner sens à la revendication collective. »
Agence fédérale d’information mutualiste, 12 mai 2014.