La responsabilité du juge : traduire l'altération par une protection adaptée

Droit des personnes malades

Date de rédaction :
01 mars 2011

Pour Marie-Hélène Isern-Réal, avocat au Barreau de Paris et membre du Conseil national des Barreaux, « même si les mesures de protection sont indispensables, justifiées sur le plan médical, elles ne peuvent être que subsidiaires, comme l’a rappelé la Cour de cassation. C’est la nécessité qui justifie la protection des personnes majeures. Il existe beaucoup d’options pour protéger les personnes, sans aller jusqu’à les mettre sous tutelle. C’est vers des solutions graduelles et fluides qu’il faut tendre. Il appartient au juge de retenir des mesures proportionnalisées et individualisées ».

Pour Anne Caron-Deglise, conseiller à la Cour d’appel de Paris, en charge de la protection des majeurs, membre du conseil scientifique de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), « le consentement de la personne doit être recherché, ce quel que soit le régime juridique de la protection. D’ailleurs, il appartient à la personne elle-même de donner son consentement et nul autre. Ce n’est que dans l’hypothèse où, après information, cette dernière n’est pas apte à prendre une décision éclairée qu’il sera possible de saisir le juge afin qu’il habilite quelqu’un pour l’assister ou la représenter lorsque des décisions d’importance sont à prendre ». La réforme de la protection des personnes majeures a eu pour objectif de bien replacer les singularités dans un contexte de vulnérabilité. « C’est de la notion de vulnérabilité que nous devons partir », écrit Anne Caron-Deglise, qui salue le travail de la Cour de cassation sur la définition des vulnérabilités, aux confins de l’éthique et du droit. Pour elle, tout l’enjeu de la loi de 2007 réside dans la lecture de ce qui est désormais l’article 457-1 du Code civil : « La personne protégée reçoit de la personne chargée de sa protection, selon des modalités adaptées à son état et sans préjudice des informations que les tiers sont tenus de lui dispenser en vertu de la loi, toutes informations sur sa situation personnelle, les actes concernés, leur utilité, leur degré d’urgence, leurs effets et les conséquences d’un refus de sa part ». Seul un médecin peut attester de l’état de vulnérabilité d’une personne, à l’origine d’une altération de ses facultés de compréhension et de jugement. La question se pose alors de savoir comment cette altération doit se traduire par une protection adaptée. La responsabilité du juge intervient à cette fin. Si la protection est subsidiaire dans le droit civil, ce ne sont pas les médecins qui sont souverains en dernière instance en la matière. Le juge, s’il est saisi, décide si la personne, avec son entourage, est à même de prendre des décisions.

EREMA. Statut juridique de la personne atteinte par la maladie d’Alzheimer placée en établissement. Workshop du 8 décembre 2010. www.espace-ethique-alzheimer.org, mars 2011.