La douleur en fin de vie au stade sévère de la maladie d’Alzheimer : quelle évaluation ?
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Le dossier de décembre 2014 d’Actualité et dossier en santé publique (revue du Haut conseil de santé publique) est consacré aux débats éthiques sur la fin de vie. Ophélie Engasser et le Pr André Quaderi, psychologues cliniciens au laboratoire d’anthropologie et de psychologie cognitives et sociales de l’Université de Nice-Sophia-Antipolis (LAPCOS, EA7278) s’insurgent contre « le faux postulat que si un patient ne crie pas, ou ne se plaint pas, c’est qu’il n’a pas mal. Pourtant, il est actuellement admis que la sensibilité à la douleur des patients atteints de la maladie d’Alzheimer est la même que pour tout autre patient douloureux. » Comment comprendre ce genre de représentations ? s’interrogent les deux chercheurs. « C’est généralement parce que l’autre exprime sa douleur selon un code qui nous est familier que nous pouvons, par empathie, avoir une idée de ce qu’il ressent. Les codes d’expression des patients atteints de la maladie d’Alzheimer au stade évolué peuvent s’avérer si éloignés des nôtres que, dans l’esprit de certains aidants, probablement par défense, il ne s’agit pas d’une douleur. » L’évaluation de la douleur pour ces patients n’est pas systématisée. Celle-ci doit reposer sur une investigation complète, basée sur l’observation clinique du patient (plainte, faciès, respiration, mimique douloureuse lors des mouvements, recherche de positions antalgiques, hypersensibilité au toucher… ; sur l’examen clinique, qui recherchera les causes possibles de la douleur (troubles trophiques liés à une mauvaise nutrition des organes, escarres, rétention d’urine, fécalome, rougeur, mycose buccale) ; le questionnement des proches du malade (familles ou soignants référents), afin de connaître ses modes de réponse à la douleur ; et sur l’évaluation quantitative de la douleur à partir d’échelles spécifiques. « Face à un patient non verbalisant, c’est par le biais d’évaluations comportementales que le soignant peut déceler l’existence de potentielles douleurs ». L’échelle comportementale de la douleur chez la personne âgée non communicante (ECPA), largement utilisée, repose sur une observation avant les soins (expression du visage, regard et mimique ; position spontanée au repos ; mouvements hors et dans le lit ; relation à autrui) et pendant les soins (anticipation anxieuse aux soins ; réactions pendant la mobilisation ; réaction pendant les soins des zones douloureuses ; plaintes exprimées durant le soin). »
Engasser O et Quaderi A. L’accompagnement en fin de vie du patient atteint de maladie d’Alzheimer ou apparentée. Actualités et dossier en santé publique 2014 ; 89 : 34-36. Décembre 2014. www.hcsp.fr/explore.cgi/Adsp?clef=146.