La Dame de fer, de Phyllida Lloyd (2)
Société inclusive
« Pour beaucoup d’Anglais, aujourd’hui encore, Lady Thatcher est une personnalité qu’on aime ou qu’on déteste. Elle est considérée soit comme une sorcière, soit comme une sainte qui a sauvé le pays », explique la réalisatrice Phyllida Lloyd. « J’ai voulu faire de sa vie un drame shakespearien » : « c’est hyperbolique, exagéré (…). « Qui s’attend à un film historique ou à un film politique sera nécessairement déçu », « mais, finalement, ce n’est peut-être pas si grave, puisque l’œuvre est moins une fresque historique qu’une méditation amère sur l’être et l’avoir été », écrit Jean-Louis Thiériot, auteur de Margaret Thatcher : de l’épicerie à la Chambre des lords (Fallois, 2007), prix de la biographie politique et prix Joseph du Teil de l’Académie des sciences morales et politiques. La polémique gronde chez les conservateurs britanniques, même ceux qui n’ont pas vu le film. L’actuel Premier ministre David Cameron pense qu’il aurait été préférable d’attendre qu’elle soit morte pour faire le film. Saluant la performance de la comédienne, il regrette que le film se concentre sur la maladie de Margaret Thatcher plutôt que sur ses actions en tant que premier ministre : «je ne peux pas m’empêcher de me dire mais pourquoi faut-il que ce film sorte maintenant ? C’est vraiment un film concernant davantage l’âge, la démence plutôt que l’action d’un ex-premier ministre extraordinaire ». Meryl Streep est « la grande arme de ce tableau parfois idiot et douteux », estime Stuart Jeffries, du Guardian, qui salue une « performance étonnante mais impeccable. Un chef d’œuvre de mimétisme » qui livre « un portrait cruel sur l’âge, la solitude et la décadence » ; fade et flou, le film ne parvient pas à incarner l’esprit indomptable de son sujet », et vise à « capturer l’image d’une femme capable de déployer politiquement la séduction sexuelle (sexual allure) ». Le Times déplore que ce biopic (film biographique) édulcore « la politique de division que Thatcher a menée sous son règne au profit d’un hymne à la féminité et d’un chant funèbre à la démence ». « Un parti pris qui laisse les années Thatcher méconnaissables » et donne à voir « un Roi Lear dans le désert de la démence », alors que, se souvient le quotidien britannique, François Mitterrand la décrivait avec « les yeux de Caligula et la bouche de Marilyn Monroe ».
Le Figaro, 9 janvier et 15 février 2012. The Times, 5 janvier 2012. www.guardian.co.uk/ , 8 février 2012. Les Echos, 15 février 2012.