Immunothérapie : double échec (2)
Recherche
Presque simultanément, les laboratoires américains Eli Lilly annonçaient que deux essais de phase III sur un autre anticorps monoclonal, le solanezumab, n’avaient pas atteint leurs objectifs principaux sur les critères cognitifs et fonctionnels chez des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer à un stade léger à modéré. Toutefois, en combinant les données des deux essais cliniques, portant sur deux mille personnes, ce qui augmente la puissance statistique de l’analyse, les chercheurs observent un ralentissement significatif du déclin cognitif. Une analyse de sous-groupe, portant uniquement sur les personnes incluses au stade léger de la maladie, montre également une réduction significative du déclin cognitif. Pour William Thies, directeur médical de l’Association Alzheimer américaine, « si ces résultats peuvent être répliqués, ils sont majeurs : c’est la première fois que l’on arrive à modifier la progression de la maladie d’Alzheimer ». Le laboratoire, qui ne déposera pas de demande d’autorisation de mise sur le marché pour le solanezumab (en raison de l’échec des essais sur leurs critères principaux), va discuter avec les autorités fédérales de santé de la suite à donner à ces résultats. Ronald Petersen, directeur du centre de recherche Alzheimer de la Mayo Clinic de Rochester (Minnesota), tempère : « si l’on regarde ces résultats avec des lunettes roses, il pourrait y avoir un bénéfice potentiel sur les tests cognitifs, mais rien ne dit que cela sera suffisant au plan clinique pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ». « Il est possible que ces essais aient été conduits trop tard dans le progression de la maladie », ajoute-t-il, et « c’est à la Food and Drug Administration (FDA, autorité régulatrice pour la mise sur le marché des médicaments) de décider de la confiance à accorder à des analyses secondaires ou à des résultats de sous-groupes : « le danger serait de sur-interpréter un résultat peu significatif ou un effet faible ». Encouragé par ces résultats très préliminaires, Dave Ricks, président de Lilly Bio-Medicines, a déclaré : « nous pensons vraiment que l’idée d’attaquer les plaques amyloïdes est une hypothèse valide, la nouvelle est importante ». « Cette conclusion doit être tenue pour provisoire », minimise Sam Gandy, directeur du centre de recherche Alzheimer à l’Ecole de médecine Mount Sinai de New York : « je pense qu’un agent permettant de réduire la charge amyloïde, comme le solanezumab, marchera peut-être à un stade précoce, voire pré-symptomatique de la maladie ; mais on ne peut rien conclure quant à la réussite d’un traitement par cette molécule avant d’avoir des résultats plus complets ».
Associated Press. www.cbsnews.com, www.alz.org, 24 août 2012.