Habitats partagés et accompagnés

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
14 janvier 2017

Dans notre monde très sensible à la performance, à la productivité, quelle est la place de la personne âgée ou handicapée ? s’interroge le Pr Régis Aubry, praticien hospitalier au CHU de Besançon, aux Journées de l’habitat partagé et accompagné tenues au Conseil de l’Europe à Strasbourg du 14 au 16 décembre 2017. Pour Stéphan Courteix, docteur en psychologie clinique au cabinet d’analyse technique et ingénierie sociale ATIS Phalène, « habiter est une condition pour être au monde. L’espace constitue l’une des dimensions les plus fondamentales de notre construction psychique et identitaire. C’est une catégorie qui n’existe pas en soi, elle procède d’une élaboration longue, complexe, à laquelle s’attelle le sujet dès sa venue au monde, et qu’il ne cesse de poursuivre sa vie durant. Dans cette quête de limites, d’une enveloppe, d’une place… qui nous permettront d’être au monde et d’entrer en relation avec les autres, un lieu tient une place toute particulière : l’habitat. Celui (ou ceux) que l’on a connu(s), enfant ; celui (ou ceux) que l’on occupe, adulte. Tous remplissent en effet, tant au niveau psychique que social, des fonctions importantes dans le développement, le ressourcement et l’épanouissement du sujet. Mais qu’en est-il pour les personnes qui, en situation de handicap, ont difficilement accès à d’autres formes d’hébergement que celles proposées par les institutions médico-sociales, ou dans des logements de droit commun qui ne leur sont pas adaptés ? »

Les Maisons de Crolles (Isère), où vivent des personnes jeunes atteintes de la maladie d’Alzheimer et apparentée, sont une initiative innovante conçue par Blandine Prévost, malade jeune, son mari Xavier et leur association AMA Diem : « avec un regard différent posé sur chaque personne, le quotidien mise sur les forces, les goûts et les habitudes de chacun. Toutes les personnes impliquées (habitants, familles, proches, bénévoles, intervenants, partenaires, associations…), font équipe pour que la vie se poursuive dans la continuité de l’histoire de chacun, avec et malgré la maladie. » L’administrateur Thierry Leleu explique à Handicap Information : « ici, nous ne parlons pas de résident ou d’employé, mais d’habitant et d’intervenant. Il est important que les personnes qui vivent avec la maladie se sentent chez elles. L’organisation est fondée sur les besoins de la personne et sur les capacités qu’elle a encore plutôt que du point de vue de ses déficits. Nous sommes très loin du prêt-à-porter institutionnel dont nous ne voulons pas reproduire le schéma. Nous recherchons en permanence le sens de notre travail, et nous faisons celui-ci de la façon la plus intelligente, adaptée et pertinente possible. Si nous réussissons, nous espérons influencer les politiques nationales et servir de modèle. »

En Suisse, la Fondation Saphir a mis en œuvre, en collaboration avec l’Association Alzheimer, le concept de colocation de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer avec l’appui de technologies domotiques. Au Québec, le Baluchon Alzheimer (relais temporaire de l’aidant à domicile, vingt-quatre heures sur vingt-quatre) permet de maintenir l’espace-habitat comme repère stabilisant pour la personne malade, et pour les proches-aidants, de retrouver du temps pour soi.