Flagrant mépris
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Kath Morgan est atteinte de la maladie d’Alzheimer. En tant qu’usager du système et chargée de cours honoraire à l’Université du Staffordshire (Royaume-Uni), elle écrit dans un éditorial de Dementia : « depuis le diagnostic, votre dignité est vulnérable à l’érosion, que ce soit de façon subtile ou par flagrant mépris (blatant disregard). Mon premier médecin généraliste m’a jugée perdue d’avance, en ne me donnant pas la dignité de répondre aux questions, et en ne m’offrant aucun avis ». « Pourquoi les infirmières vous traitent-elles avec autant de désinvolture (offhandedly), écartant vos difficultés, et semblant s’amuser à vous ridiculiser ? J’ai connu des infirmières qui m’ont pris la tension sans me parler ni me regarder : toutes sortes de façons sournoises de me priver de ma dignité ». « Pour moi, la dignité, ce n’est pas d’être traitée comme si je ne savais rien. J’ai toujours mon intelligence. Je peux traiter les choses plus lentement, mais je peux toujours comprendre ; alors, s’il vous plaît, parlez-moi, ne faites pas comme si je n’étais pas là. La dignité, c’est être capable d’avoir des opinions, et je n’en manque pas. La dignité, c’est d’être traitée comme toute autre femme. J’aime toujours les mêmes choses : la mode, le style, les bébés, les livres et le jardinage, et j’adore papoter. J’aime même les choses que je ne peux plus faire. La dignité, c’est d’âtre habillé correctement. Nous sommes tous jugés sur l’apparence. Nous devons nous présenter au mieux pour être acceptés (aussi longtemps que nous le pourrons) par la société. En réalité, il n’y a pas de dignité dans la démence. Si ne nous faisons pas attention, nous pouvons devenir si sensibles à la perte de dignité que nous pouvons voir une perte là où il n’y en a pas. Nous voyons tous de manière différente la dignité et les affronts qu’on lui fait. Peut-on être formé à la dignité ? », poursuit Kath Morgan, qui ajoute : « les victimes d’Alzheimer ou de démence sont à la merci d’un système qui nous considère comme des statistiques, qui nous maltraite pour que nous nous soyons conformes à la norme, qui nous met dans une boîte pour être capable de cocher les cases ou de remplir les critères, qui détruit notre confiance et écrase notre dignité ».
Morgan K. Dignity in dementia : a personal view. Dementia 2011 ; 10(3) : 281-282. Août 2011. http://dem.sagepub.com/content/10/3/281.full.pdf+html (texte intégral).