Droits des personnes malades : le dilemme des aidants Janvier 2009
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Pour Fabrice Gzil, attaché temporaire d’enseignement et de recherche au département d’histoire et de philosophie des sciences de l’Université Paris 7-René Diderot, la littérature consacrée aux enjeux éthiques liés à la maladie d’Alzheimer aborde trop rarement les dilemmes moraux rencontrés par les proches et leur famille, qui se trouvent dans une situation éthique tout à fait singulière. Ils doivent prendre, le plus souvent seuls, des décisions qui devraient être prises par d’autres ou avec d’autres. Ils doivent sans cesse arbitrer entre des exigences et des valeurs contradictoires (liberté et sécurité, intérêt de la personne malade et intérêt des tiers). Ils sont souvent eux-mêmes impliqués (concrètement ou affectivement) dans les décisions. Enfin, à la différence des parents qui font des choix pour leurs enfants mineurs, ils ne peuvent pas prendre les décisions dans la perspective de l’autonomie future de la personne, car celle-ci ne recouvrera pas la capacité à prendre seule ses décisions, et ne pourra ni se réapproprier ni se révolter contre les décisions qui auront été prises en son nom. Ces quatre caractères font que les choix que doivent faire les aidants ont souvent un caractère tragique, c’est-à-dire sans solution. Cela ne signifie pas que les proches et les familles doivent se résigner à toujours prendre leurs décisions tristement et à regret. Cela signifie, en revanche, qu’il faut beaucoup de force morale pour surmonter ces dilemmes. Si les aidants peuvent, pour cela, s’appuyer sur une représentation claire et réaliste de la manière dont la maladie d’Alzheimer au stade modéré affecte l’autonomie des personnes atteintes, peut-être leur tâche en sera-t-elle un peu facilitée et peut-être leur « fardeau » en sera-t-il quelque peu diminué.
Réalités familiales, décembre 2008.