Drames de l’épuisement
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Aux Pays-Bas, Karlijn Joling et ses collègues, du centre médical de l’Université libre d’Amsterdam, ont suivi, pendant 2 ans, 200 aidants familiaux de personnes atteintes de démence, sans troubles dépressifs à l’inclusion, avec une évaluation tous les 3 mois. À la fin de l’étude, 4 aidants sur 10 (39.6%) présentaient des symptômes de dépression, et 4.7% des pensées suicidaires. Ces derniers avaient des signes dépressifs et anxieux plus sévères, un sens plus faible de leur compétence et de leur capacité à maîtriser la situation, se sentaient moins heureux, avaient davantage de problèmes de santé, moins de soutien familial et se sentaient plus seuls que les aidants dépressifs sans pensées suicidaires. Les chercheurs poursuivent l’identification des aidants à haut risque pour développer le cadre d’interventions de prévention.
En France, un octogénaire, reconnu coupable de meurtre sur conjoint, vient d’être condamné à cinq ans de prison avec sursis par la Cour d’assises de l’Isère. Sa femme était atteinte de la maladie d’Alzheimer. Au jury, il a expliqué : « J’étais épuisé. Moralement et physiquement. Je n’avais plus la force de m’occuper de ma femme. Cela me demandait beaucoup de travail. Je lui faisais à manger, je lui faisais la toilette, je la sortais. Et j’étais seul. Je ne voyais pas d’issue. Je ne pouvais plus accepter la vie que l’on avait. » Pour l’expert psychiatre, il était devenu dépressif et au moment de son passage à l’acte, « il présentait un trouble psychique ayant aboli son discernement ». Les jurés n’ont reconnu qu’une « altération » de ce discernement. Dans son réquisitoire, l’avocat général avait demandé qu’« Alzheimer ne soit pas une autorisation de tuer. Monsieur O. aurait dû accepter l’aide de professionnels pour assister son épouse. Il s’est lui-même enfermé dans cette situation. Il en est donc responsable. » « J’espère que mon procès fera prendre conscience à des gens confrontés à cette maladie qu’il faut se faire aider. » confie le mari.
Joling K et al. The occurrence and persistence of thoughts of suicide, self-harm and death in family caregivers of people with dementia: a longitudinal data analysis over 2 years. 27th Alzheimer’s Europe Conference. Care today, cure tomorrow. Berlin, 2-4 octobre 2017. P8.1.www.alzheimer-europe.org/Conferences/Previous-conferences/2017-Berlin/Detailed-programme-and-abstracts/P8.-Carers-of-people-with-dementia/(language)/eng-GB. www.leparisien.fr/faits-divers/isere-du-sursis-pour-l-octogenaire-qui-avait-tue-sa-femme-malade-04-11-2017-7371831.php, 4 novembre 2017. AFP, 2 novembre 2017. www.liberation.fr/societe/2017/11/02/tuer-sa-femme-atteinte-d-alzheimer-une-delivrance-jugee-aux-assises_1607482, 2 novembre 2017.