Diagnostic et conscience de la personne malade

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
08 octobre 2011

Pour le gériatre Michel Cavey Lemoine, praticien hospitalier à l’unité de soins palliatifs de Montfermeil (Seine-Saint-Denis), « les gériatres se voient souvent confrontés à des personnes âgées qu’ils découvrent dans leur lit, avec une démence tellement profonde, tellement avancée, que la question surgit inévitablement : mais comment a-t-on pu méconnaître si longtemps une telle catastrophe ? ». Si la famille ou le médecin ne se sont pas rendu compte de la situation, la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer peut-elle, en dissimulant son trouble, provoquer ce diagnostic tardif ? Le gériatre décrit trois niveaux de fonctionnement mental. Le niveau « reptilien » est celui des automatismes et réflexes archaïques, neurologiques, conditionnels, permettant, selon lui, d’accomplir la quasi-totalité des tâches des actes de la vie quotidienne. Le niveau « idéel » permet de prendre des décisions devant une situation imprévue, grâce au pouvoir de fabriquer des solutions : c’est la pensée construite, avec la mécanique permettant d’utiliser la mémoire, les systèmes de codage, d’enrichissement, de rappel. La personne atteinte de démence perd peu à peu cette capacité, mais cette perte peut passer inaperçue jusqu’au moment où il faut qu’elle s’en serve. Enfin, le niveau « conscientiel » est un méta-niveau, propre à l’humain, permettant à la personne malade de se « savoir étant », et plus encore, comme « étant au monde ». Pour le gériatre, c’est le niveau « idéel » qui tombe en panne dans la maladie d’Alzheimer, et longtemps, les autres niveaux ne sont pas touchés, et notamment, le niveau de la conscience. Selon lui, parler d’anosognosie (le fait d’ignorer qu’on est malade) n’a de sens que pour dire que la personne malade ne sait pas à quel point elle est malade (ou qu’elle croit que ses stratégies de dissimulation sont efficaces), ou alors « pour rappeler qu’on ne peut guère distinguer celui qui ne sait pas qu’il est dément et celui qui ne veut pas le dire ».

Cavey Lemoine M. Entre conscience et oubli… Ou pourquoi certaines personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont diagnostiquées trop tard.  Doc’Alzheimer 2011 ; 4 : 28-30. Juillet-septembre 2011.