Décision rationnelle : deux termes contradictoires ?
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Pour Claire Wolfs, de l’Ecole de santé mentale et neuroscience du centre Alzheimer du Limburg, et ses collègues du département de psychiatrie et psychologie du centre médical universitaire de Maastricht (Pays-Bas), qui ont interrogé vingt-neuf aidants de personnes atteintes de démence, le processus de décision concernant le traitement et les soins consiste en trois composantes élémentaires : identifier les besoins de la personne ; explorer les options possibles ; faire un choix. L’étape critique est celle de l’exploration, qui est cruciale pour l’acceptation de la maladie. Par rapport à d’autres maladies chroniques, le contexte de la démence rend la prise de décision difficile pour quatre raisons : la difficulté à accepter la démence ; la nature progressive de la démence ; la dépendance (reliance) à un tiers pour prendre la décision ; les émotions fortes. Pour les auteurs, l’aidant et le professionnel de santé doivent avoir un rôle plus actif, particulièrement dans la phase d’exploration, ce qui facilite l’acceptation et l’adaptation à la maladie. L’acceptation est une condition importante pour réduire l’anxiété et la résistance aux soins.
Des experts de l’Association américaine de psychologie, spécialistes d’éthique (Rogerson et al) questionnent : la plupart des modèles de prise de décision éthique proposent un processus logique et rationnel, mais ces modèles empiriques ne reposent sur aucune preuve et s’appuient sur des hypothèses et un raisonnement rationnels, conscients et quasi-juridiques. Ces modèles restent prédominants, bien que de nombreux facteurs non rationnels influencent la pensée éthique et le comportement : le contexte, les perceptions, les relations, les émotions et l’heuristique (« l’art d’inventer, de faire des découvertes »). Une grande partie de la recherche comportementale a démontré l’importance des processus automatiques intuitifs et affectifs dans la prise de décision et le jugement. Ces processus affectent profondément le comportement humain et introduisent des biais dans les théories normatives de la rationalité. Les auteurs proposent une revue de la littérature et des recommandations pour intégrer ces processus non rationnels dans la prise de décision éthique.
Wolfs CA et al. Rational decision-making about treatment and care in dementia: A contradiction in terms? Patient Educ Couns, 31 août 2011.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21889285.
Rogerson MD et al. Nonrational processes in ethical decision making. Am Psychol, 29 août 2011. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21875170.