Corps, désirs, sexualité, coordonné par Pascal Dreyer (3)
Société inclusive
Pour Marie-Hélène Colson, médecin sexologue à l’hôpital Sainte-Marguerite de Marseille, « la sexualité n’est plus aujourd’hui un tabou pour les plus âgés d’entre nous, mais bien une nouvelle réalité », et « le vieillissement physiologique des hommes et des femmes qui vieillissent en bonne santé semble, contrairement aux idées reçues, n’avoir que très peu de conséquences sur l’accomplissement sexuel. Les fausses croyances, la solitude affective et la maladie apparaissent comme les seuls vrais paramètres à même de limiter concrètement la sexualité des plus âgés ». Jean-Marc Talpin, psychologue clinicien et maître de conférences à l’Université Lumière-Lyon 2, s’appuie sur une lecture clinique du roman Exit le fantôme de Philip Roth pour analyser le renoncement à la sexualité au cours du vieillissement, avec à la fois une dimension de contre-investissement et une pulsion qui ne parvient, pas à transformer ses investissements en fonction de l’évolution du corps et de objets d’amour.
Le contexte spécifique de la démence est abordé par Alain Giami et Lorraine Ory, de l’équipe Genre, santé sexuelle et reproductive de l’INSERM-U1018 au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), à travers une analyse des représentations dans la littérature scientifique et savantes et professionnelles. Peu traité, selon les auteurs, le thème de la sexualité et de la maladie d’Alzheimer est centré autour de la question des « comportements sexuels inappropriés », dont notamment « l’hypersexualité » qu’il s’agit de contenir, voire même de réduire. Ces comportements apparaissent comme une source de malaise pour les soignants et l’entourage familial. Ce projet a été soutenu par la Fondation Plan Alzheimer. Pour le psychiatre Gérard Ribes, du laboratoire Santé, individu, société (EMA 4128) à l’Université Lumière-Lyon 2, « la maladie d’Alzheimer oblige l’entourage à se positionner vis-à-vis de l’intimité et de la sexualité de la personne malade. Au sein d’un couple, permettre à celui qui est touché par la maladie de rester un individu pouvant exprimer du désir et s’inscrire dans une sexualité normale, c’est entretenir un mode relationnel et communicationnel. Au sein d’une institution, la question de l’anormalité, voire de la bestialité des comportements sexuels oblige les équipes soignantes à une réflexion sur la nature des comportements sexués de la personne malade, et invite à une réflexion institutionnelle globale sur la place de l’intimité au sein de l’établissement et sur les représentations des soignants concernant la sexualité.
Colson MH. Sexualité et pathologies du vieillissement chez les hommes et les femmes âgés. Gérontologie et société 2012 ; 140 : 109. Mars 2012. Giami A et Ory L. Constructions sociales et professionnelles de la sexualité dans le contexte de la maladie d’Alzheimer. Gérontologie et société 2012 ; 140 : 145. Mars 2012. Ribes G. Regards sur l’intimité du dément. Gérontologie et société 2012 ; 140 : 159. Mars 2012.