Captation d’héritage

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
01 août 2017

À Coppet (Suisse), la demeure d’exil de la philosophe et femme de lettres Germaine de Staël (1766-1817), d’origine valdo-genevoise, est au cœur d’une âpre dispute familiale et judiciaire, sur fond de spéculation immobilière. Le domaine a été hérité par le comte Othenin d’Haussonville, descendant de la huitième génération, qui a créé une fondation pour protéger les biens immobiliers et les collections historiques. En 2012, le comte est hospitalisé suite à un accident vasculaire cérébral. Un diagnostic de démence est posé. Il est transféré dans deux autres institutions où les médecins préconisent un placement sous tutelle. La veille de l’expertise psychiatrique, un avocat parisien, auquel le comte a donné mandat quelques jours plus tôt alors qu’il ne le connaissait pas, se présente à l’hôpital gériatrique de Courbevoie et exige le transfert immédiat du patient vers la Suisse. Le médecin confronté à ce passage en force, paniqué, appelle la famille : « Je consulte nos services juridiques, mais je n’ai pas le droit de le retenir ! » En Suisse, le patient “exfiltré” est accueilli par Me Françoise Dorsaz-Meyer, une avocate genevoise qu’il n’avait jamais rencontrée elle non plus auparavant. Cinq jours plus tard, il signera pourtant en sa faveur une procuration pour toute décision concernant son patrimoine et sa personne, mandat renouvelé et étendu devant notaire au cours des mois suivants. Ce départ précipité, en avion et contre avis médical, conduit les responsables de l’hôpital à rédiger le jour-même un signalement qu’ils adressent au procureur de la République de Nanterre : “Toute cette agitation autour de notre patient nous laisse penser que M. d’Haussonville pourrait être abusé par son entourage et qu’il est urgent de le protéger” », écrivent-ils. Coupé des siens, le comte meurt seul en 2014. Deux mois plus tard, Me Dorsaz-Meyer est nommée à la présidence de la fondation, « parachevant aux yeux des descendants une véritable prise de contrôle des biens et de la famille. » À Nanterre, trois juges d’instruction se sont succédé depuis la plainte pour abus de faiblesse.