Audition et cognition : qui s’en soucie ?
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« La perte d’audition accélère le déclin cognitif », titre Tristan Vey, du Figaro. « A l’occasion de la Semaine du son, les spécialistes insistent sur l’importance d’une prise en charge précoce. » « Un Français sur deux ne va jamais consulter de sa vie un spécialiste pour faire contrôler son audition », s’inquiète Jean-Louis Horvilleur, audioprothésiste impliqué dans l’organisation de cet événement, organisé par des acousticiens. « Une prise en charge précoce avec des prothèses auditives adaptées permet pourtant dans la plupart des cas de vivre une vie normale », souligne le Pr Hung Thai-Van, chef du service d’audiologie au centre de neurosciences du CHU de Lyon. « Cela permet aussi de ralentir la perte d’audition.» Lorsqu’une personne commence à devenir un peu sourde, c’est généralement parce que son oreille interne est abîmée, explique-t-il. « Nous avons un capital de 12 500 cellules ciliées externes, 3 000 internes et 30 000 neurones auditifs qui ne se renouvelle pas. À partir de l’âge de vingt ans, on perd entre 3.5 et 7% de ces cellules ciliées par décennie. » Différents traumatismes (écoute prolongée au casque, travail en milieu bruyant, concerts, etc.) peuvent accélérer le phénomène. Avec la perte de ces cellules, qui jouent un rôle fondamental dans l’amplification du son, l’ouïe devient moins fine, notamment dans les aigus. « Comme la nature a horreur du vide, les régions du cerveau qui gèrent ces gammes de fréquences vont être affectées à d’autres tâches. » Cette réorganisation neuronale a pour conséquence d’amplifier la surdité du patient. « S’il est équipé de prothèses adaptées, en revanche, le malentendant va conserver, voire recouvrer, la capacité cérébrale à traiter ces sons.» Des recherches ont montré que la surdité des personnes âgées avait par ailleurs des conséquences délétères sur le cerveau. « En situation d’écoute compétitive, dans un réfectoire bruyant par exemple, le malentendant va mobiliser son lobe préfrontal pour essayer d’isoler certains sons et les analyser », explique Hung Thai-Van. Le fonctionnement normal de cette partie du cerveau, d’ordinaire consacrée à la mémoire de travail (gestion et traitement des informations à court terme), s’en trouve affecté. Le déclin cognitif est ainsi 30 à 40% plus rapide chez les personnes âgées souffrant de presbyacousie (surdité bilatérale lentement évolutive). Et le risque de démence s’en trouve accru.
http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/01/31/21924-perte-daudition-accelere-declin-cognitif, 31 janvier 2014. Lin F et al. Hearing Loss and Cognitive Decline Among Older Adults. JAMA Intern Med 2013; 173(4): 293-299. 205 février 2013.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3869227/pdf/nihms536265.pdf (texte integral)