Aide à domicile : éthique de l’intervention auprès des personnes atteintes de troubles cognitifs
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Pour Alice Casagrande, « trois problèmes éthiques semblent récurrents. Premièrement, concilier ce que l’on comprend comme un soin de qualité, avec ce que la personne semble espérer de l’intervenant : autrement dit, prendre au sérieux son consentement. Deuxièmement, concilier ce que l’on croit comprendre de la personne et de son rythme, et les aspirations des aidants : autrement dit, arbitrer sans cesse entre deux logiques qui se superposent. Troisièmement, trouver les ressources de créativité pour rester en situation de communication, lorsque de nombreux facteurs interfèrent (manque de temps, retrait relationnel de la personne, multiplicité des intervenants…) ».
Anne-Bérénice Simzac, chargée de mission au pôle Études et recherche de la Fondation Médéric Alzheimer, a analysé les réponses de deux cent cinquante-huit responsables de services d’aide à domicile à la question ouverte, posée à la fin du questionnaire de l’enquête, qui les invitait à décrire une situation illustrant de manière concrète les difficultés éthiques rencontrées par leur service dans l’aide aux personnes atteintes de troubles cognitifs. Les propos des répondants montrent que, même si cela n’est pas fréquemment décrit dans la littérature, les services d’aide à domicile rencontrent d’authentiques dilemmes moraux ; que certains de ces conflits de valeurs sont propres au secteur de l’aide à domicile ; et que les services trouvent parfois des solutions concrètes pour résoudre les cas de conscience auxquels ils sont confrontés. Un grand nombre de répondants décrivent des situations de refus d’aide de la part de la personne. Ces refus portent parfois sur un moment précis de l’aide, comme le ménage, l’alimentation ou la toilette. Les responsables de services s’interrogent sur la conduite à tenir : « Faut-il respecter les désirs de la personne aidée ou dispenser l’aide malgré tout, pour son bien ? » bien souvent, ce sont les intervenantes qui sont en première ligne et qui doivent résoudre, seules, les cas de conscience posés par les refus de soin. Plusieurs responsables de service se demandent s’il est éthiquement légitime de laisser les intervenantes, qui sont « épuisées par cette prise en charge », affronter seules les refus de soins dans ces conditions. Dans certains cas, les services mettent en œuvre des solutions de compromis : les intervenantes ne réalisent pas systématiquement toutes les tâches prévues ou n’en effectuent qu’une partie. Cela peut engendrer un mécontentement des familles. Le service doit trouver un équilibre entre le respect du refus exprimé par la personne et les attentes de sa famille, avec laquelle le service a intérêt à conserver de bons rapports, dans l’intérêt de la personne ».
Fontaine D et al (coord.). Aide à domicile et maladie d’Alzheimer. Lettre de l’Observatoire des dispositifs de prise en charge et d’accompagnement de la maladie d’Alzheimer 2012 : 25.Décembre 2012. www.fondation-mederic-alzheimer.org/Nos-Travaux/La-Lettre-de-l-Observatoire/Numero-en-cours.