Aidant familial, c’est un métier qui doit s’apprendre (2)

Société inclusive

Date de rédaction :
29 avril 2014

Le vieux monsieur ajoute : « être aidant familial, c’est un métier riche en imprévus, un métier qui s’apprend. La première chose que j’ai apprise, c’est à me taire et à l’écouter. J’ai appris qu’il ne faut pas la contrarier, ne pas dévaluer ses performances pour qu’elle ne s’installe pas dans la passivité : je me débrouille pour qu’elle gagne à la belote, je ne lui fais plus remarquer qu’elle lave mal la vaisselle. J’ai aussi appris à ne lui demander qu’une seule chose à la fois pour m’aider. Je n’ai pas fini d’apprendre. Je ne lui cuisine que ce qu’elle aime bien et la laisse manger quand elle le souhaite. Ce qui m’aide à tenir le coup, ce sont les sorties et les ateliers organisés pour les aidants par Rivage [la plateforme de répit locale]. Les sorties sont l’occasion d’échanger, de confier ce que nous ne disons à personne d’autre, de parler par exemple de la difficulté à changer les couches, du sentiment de culpabilité à placer son conjoint en accueil temporaire ou définitif quand le maintien à domicile n’est plus possible. Je relativise ma situation : d’autres sont dans des difficultés pires que moi. Les ateliers de Rivage nous permettent d’apprendre l’essentiel de ce qu’il faut savoir de la maladie, que nous aurions dû nous expliquer dès le début de la maladie. Nous nous encourageons mutuellement : le travail entre aidants est le meilleur toubib. Lors du dernier atelier, un gériatre nous a parlé de deuil blanc : j’ai toujours une conjointe, mais elle ne sait plus où elle est. Il y a rupture complète. Mais ça fait cinquante-six ans que nous vivons ensemble : je l’accompagnerai jusqu’au bout. Une seule chose me serre la gorge : il est impossible de prévoir comment évoluera la maladie. Je n’oublie pas pour autant d’être heureux : je réussis à lire, à écouter de la musique. »