A quoi servent les médicaments spécifiques de la maladie d’Alzheimer ? (2)
Droit des personnes malades
Christophe Trivalle, praticien hospitalier à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif, s’insurge : « le danger d’une telle décision est d’ignorer que ce qui est fait pour ces malades repose avant tout sur la mise en route d’un traitement spécifique». Sans les médicaments, poursuit-il, « on en serait toujours à la démence sénile et à la non-reconnaissance de ces malades. Même si leur efficacité est modeste et s’ils ont des effets secondaires connus, ce ne sont pas des placebos. Ce sont de vrais médicaments. Qui dit thérapeutique (même très modeste) dit diagnostic et bilan spécifique. Si on enlève ces médicaments (déremboursement ou SMR faible), l’effet domino est évident et prévisible : à quoi cela sert-il de faire un diagnostic s’il n’y a plus de traitement ? Pourquoi adresser un patient à un centre mémoire ? Pourquoi faire un suivi si on ne fait rien ? C’est la disparition assurée des centres mémoire, des réseaux et de la recherche. Cette décision désastreuse, si elle était prise, entraînerait un retour en arrière de vingt-cinq ans et une perte définitive pour la recherche française de pouvoir un jour découvrir un traitement efficace. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas revoir le prix de ces médicaments à la baisse, et qu’il n’y a pas de possibilité de faire des économies qui sont nécessaires. Mais pour l’instant et faute de mieux, il faut leur garder leur « rôle structurant », qui est très important. Si on supprime ces médicaments, la France sera le premier pays qui verra ainsi disparaître la maladie d’Alzheimer, car plus personne ne fera de bilan diagnostique pour une pathologie sans aucun traitement. Et on en reviendra à la démence sénile et au bon vieux gâtisme d’antan ».
Le Monde, 20 septembre 2011. AFP, www.romandie.com, 19 septembre 2011.