Entrée en établissement : les six premiers mois

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
25 septembre 2014

« Il faut du temps pour qu’une personne âgée puisse accepter la vie en institution », explique le psychologue Yves Clercq. « Chacun vivant différemment cette entrée, il est bien difficile, à l’avance, de savoir comment la personne va réagir sur le long terme. Certaines semblent bien s’adapter dès le début, vivre cette entrée comme un passage vers une nouvelle vie, alors que d’autres sont littéralement effondrées et pensent que leur vie s’est arrêtée sur le palier de l’institution. Or, à six mois, les choses sont souvent fort différentes. Les personnes que l’on pensait voir s’intégrer rapidement ne le sont pas forcément, et les personnes qui pouvaient être effondrées en arrivant ne le sont plus. D’autres ont glissé rapidement vers la dépression ou la désorientation, d’autres enfin sont décédées très rapidement. » Pour le psychologue, « s’il est vrai que le non-consentement de la personne peut représenter un obstacle indéniable à un accueil de qualité, l’acceptation préalable de la personne ne représente pas pour autant un gage d’intégration. Au-delà des habitudes de vie qu’il faut réinventer, cette période représente aussi et surtout un temps de réaménagement intérieur, un temps de confrontation à soi, un temps d’intégration de ses propres limites, d’une violence insoupçonnée, que la dimension matérielle de l’aménagement et les inquiétudes de l’entourage vont souvent occulter. » Les six premiers mois représentent une période clé, dans laquelle se joue l’avenir du séjour dans l’institution. Pour l’auteur, « ce ne sont pas seulement de protocoles d’accueil ou de projets individualisés dont la personne a besoin, mais aussi d’attention, d’oreilles et de regards indispensables pour faire face à une multitude de deuils dont nous n’avons pas forcément conscience : le changement de lit, les horaires et exigences institutionnelles, la vie collective, la confrontation à l’autre, miroir d’un devenir non souhaité, les remarques inévitables, les déceptions quant à des attentes plus ou moins exprimées, mais aussi le deuil d’une vie passée indispensable pour envisager la vie en institution comme une nouvelle période de sa vie. »

Géroscopie pour les décideurs en gérontologie, septembre 2014.