Anticipation : de quoi parle-t-on ?

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Date de rédaction :
29 août 2014

Hervé Chneiweiss, directeur du laboratoire de neuroscience Paris-Seine (UMR8246 CNRS/U1130 INSERM/UMCR18 Université Pierre et Marie Curie,) et président du comité d’éthique de l’INSERM, s’intéresse au concept de malade potentiel, futur malade ou malade possible, dans un état de « santé comptée » et de « maladie non avérée ». Selon lui, « la médecine des 4P (prédictive, préventive, personnalisée et participative) va induire l’apparition d’un nouveau sujet, porteur d’un processus pathologique potentiellement source d’une maladie mais pas encore, et peut-être jamais, malade au sens clinique de la maladie grâce à son interaction avec une pratique médicale qu’il va être également nécessaire de renouveler ». « Dans le contexte des diagnostics précoces, se pose la question du statut épistémologique [relatif à l’étude critique des sciences] d’un “savoir d’anticipation incertain” et de sa portée éthique. De quel type de responsabilité relèvent ces savoirs ? » s’interroge pour sa part Léo Coutellec, chercheur en philosophie des sciences à l’Espace de réflexion éthique de la région Ile-de-France (EA1610, Université Paris-Sud, Labex Distalz). « D’un type nouveau et incluant responsabilités juridique et morale, la responsabilité épistémique est une forme de responsabilité sociale, une co-responsabilité sur les impacts potentiels de nos actes. Elle est donc sensiblement orientée vers le futur et elle est liée au statut des savoirs ainsi qu’aux rapports que la société entretient avec eux. Elle indique que nous sommes tous et différemment co-responsables face aux savoirs, à leur création comme à leur diffusion ou leur appropriation, et ceci d’autant plus en situation d’anticipation. » Pour Fabrice Gzil, docteur en philosophie et responsable du pôle Études et recherches à la Fondation Médéric Alzheimer, il est possible d’analyser les maladies dites « neurologiques dégénératives » à la lumière de la conception moderne du handicap (qui distingue des déficiences, des limitations d’activités et des restrictions de participation), la notion d’anticipation impliquant alors un rapport au temps, à soi-même et aux autres. »