Comprendre l’usage pour améliorer l’espace
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« Même si la chambre est souvent désignée comme le domicile de la personne qui l’occupe, elle n’a pas toujours les moyens de l’investir, ni même de maîtriser et de choisir les personnes qui sont amenées à y pénétrer », soulignent Colette Eynard, consultante en gérontologie, et Kevin Charras, docteur en psychologie environnementale. « Quant aux espaces collectifs, leur usage est strictement encadré (restaurant fermé en dehors des repas, salles d’activité accessibles en la seule présence d’un professionnel. Si les salons et parfois l’accueil sont investis par les résidents, il ne viendrait à personne l’idée d’y imprimer sa marque. Habiter l’espace dépend alors des résidents et de leur capacité à trouver un équilibre entre les regrets de ce qu’ils ont perdu et ce que peut leur offrir cette nouvelle vie. Certains d’entre eux se réfugient dans leur chambre, d’autres savent s’accommoder des limites imposées par l’institution et en font le meilleur usage possible. Mais qu’en est-il des personnes atteintes de troubles cognitifs, qui n’ont plus forcément conscience de ces changements et de ces limites ? » Pour Colette Eynard et Kevin Charras, « il est essentiel que les professionnels qui accompagnent ces personnes, quels que soient leur statut et leur rôle, aient eux-mêmes compris l’importance de l’espace, comme support et non comme simple décor dont on ne maîtriserait ni le sens, ni l’usage. À partir d’un travail d’observation de plusieurs unités de vie, plusieurs points développées dans le cadre du programme Eval’zheimer [programme d’intervention psychosociale pour personnes âgées avec des troubles cognitifs, développé par la Fondation Médéric Alzheimer, testé et évalué avec le soutien des fédérations des caisses de retraite complémentaires AGIRC et ARRCO], plusieurs points apparaissent fondamentaux : donner des repères spatiaux ; assurer une cohésion sociale par l’espace ;préserver l’aspect domestique ; garantir la « privacité » (capacité de l’espace à se laisser approprier par les personnes qui l’occupent, en leur donnant la liberté, donc le choix, de l’occuper de plusieurs manières), ; gommer l’aspect « soins » (les chariots et les blouses doivent-ils être ostensibles ?) et éviter les espaces de type « mirador ».
Eynard C et Charras K. Comprendre l’usage pour améliorer l’espace. Animagine 87 : 6-8. Octobre-novembre 2014.