Pure spéculation
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« Madame de Sévigné plaçait la mémoire dans le cœur, car, disait-elle, “quand elle ne nous vient point de cet endroit, nous n’en avons pas plus que les lièvres” ». Les investisseurs, eux, ont avant tout celle du portefeuille », écrivent Les Echos. L’annonce de résultats positifs d’un candidat médicament contre la maladie d’Alzheimer a créé près de quatorze milliards d’euros de valeur boursière en trois séances pour les laboratoires Biogen (Etats-Unis) et Eisai (Japon), co-développeurs de l’anticorps monoclonal aducanumab ciblant la plaque amyloïde, et pour le laboratoire américain Eli Lilly, qui commercialise le biomarqueur de la protéine amyloïde pour l’imagerie cérébrale. « Il importe peu que ce remède n’ait été testé pour l’instant que sur cent soixante-six patients, dans le cadre de la phase initiale des essais cliniques, et qu’il n’agisse que sur les formes modérées des troubles. Mieux vaut oublier qu’il appartient à une famille de molécules plusieurs fois mise en échec. Ni se laisser aveugler par une récente étude qui laisse penser que le traitement ne vise pas la bonne cible thérapeutique (la plaque amyloïde) pour être complètement efficace », préviennent Les Échos. Le magazine financier Forbes alerte : « les effectifs sont petits, et les doutes élevés. » Lon Schneider, professeur de psychiatrie à l’Université de Californie du Sud, déclare : « personnellement, je n’investirais pas sur la base de ces résultats : la taille de l’échantillon est trop petite. » Quels sont les résultats ? En termes d’efficacité, dans le groupe placebo, le score cognitif a baissé de -3.14 points en un an, contre -0.58 dans le groupe traité par l’anticorps à la dose de 10 mg/kg. Cette différence est significative, les investigateurs ayant sélectionné les patients au stade précoce de la maladie d’Alzheimer, lorsqu’ils commencent à montrer les premiers signes cliniques, et qu’ils présentent des plaques amyloïdes en imagerie cérébrale. 30% des patients potentiels, qui ne présentaient pas de plaques amyloïdes, n’ont pas été inclus dans l’étude. En termes d’effets indésirables, 22% des patients traités par l’anticorps ont eu mal à la tête, contre 5% dans le groupe placebo. Mais un œdème cérébral est observé chez 17% des patients non porteurs du gène APOEε4 (prédisposant à la maladie d’Alzheimer) et 55% des patients porteurs de ce gène, après traitement par la dose d’anticorps de 10 mg/kg. Le laboratoire Biogen a décidé de lancer des essais cliniques de phase 3 (à grande échelle chez l’homme). Un analyste financier de Bernstein Research évalue à 25% la probabilité que cette stratégie d’immunothérapie arrive sur le marché, après 2020 dans le meilleur des cas. « Ces résultats de Biogen semblent trop beaux pour être vrais, mais c’est en partie parce que jusqu’à présent les chances de trouver un médicament éliminant les plaques amyloïdes ont été si infimes ».
www.forbes.com/sites/matthewherper/2015/03/20/biogen-drug-could-inspire-new-hope-for-alzheimers-treatments/, 20 mars 2015. www.lesechos.fr, 25 mars 2015.