Suisse, Japon, France : la capacité de discernement vue par le notaire

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
13 juin 2015

La capacité de discernement (Urteilsfähigkeit, judgment capacity) et la validité des actions en justice prendront une importance accrue avec l’allongement de l’espérance de vie et le nombre croissant de personnes atteintes notamment de démence, écrivent Stephan Wolf et Isabelle Nuspliger, professeurs de droit civil à l’Université de Berne (Suisse). Selon l’article 16 du Code civil helvétique, est capable de discernement  « toute personne qui n’est pas privée de la faculté d’agir raisonnablement en raison de son jeune âge, de déficience mentale, de troubles psychiques, d’ivresse ou d’autres causes semblables ». « L’incapacité de discernement requiert donc l’existence de ces conditions (aspect objectif) qui doit avoir pour effet la perte de capacité d’agir rationnellement (aspect subjectif). La capacité de discernement est relative et doit toujours être évaluée dans un contexte déterminé : elle doit être confirmée ou réfutée pour une transaction spécifique à un instant spécifique. Selon la loi, la capacité de discernement est présumée et c’est le contraire qui doit être prouvé.  La capacité de discernement doit être vérifiée par le notaire, même de façon brève et limitée. Si cette capacité de discernement est contestée, seul le juge civil a le pouvoir de rendre un jugement contraignant. »

Au Japon, les testaments rédigés par un notaire ont une plus grande valeur juridique et sont plus complets que les testaments rédigés sans notaire, ce qui peut éviter des conflits de succession, rappelle le journal japonais Mainichi. Dans certains cas, des personnes, chez qui on suspecte une altération du discernement en raison d’une démence ou d’une autre maladie, ont laissé un testament dont les proches contestent la validité en justice. L’Association nationale des notaires du Japon a renforcé ses programmes de formation professionnelle pour aider des membres à mieux évaluer la capacité de discernement des testateurs. Un changement de politique fiscale depuis janvier 2015 a réduit de 60% l’abattement standard pour les droits de succession, qui concernera donc davantage de personnes et accroît la demande potentielle de testaments notariés.

En France, la Fondation Médéric Alzheimer a conçu, en partenariat avec le Conseil supérieur du notariat, une brochure pour aider le notaire à vérifier que la disposition est prise de manière éclairée, à s’assurer que l’acte exprime la volonté propre du client, à se méfier des stéréotypes sur l’avancée en âge, à traiter les personnes en situation de handicap cognitif avec la même considération que les autres citoyens (les « quatre devoirs du notaire »).

Wolf S et Nuspliger I. Judgment capacity from the legal viewpoint – especially the evaluation by a notary public. Ther Umsch 2015; 72(4): 247-253. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25791048. Mainichi Japan, 28 juin 2015. http://www2f.biglobe.ne.jp/boke/dementiaj.htm(site en anglais). Fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs, lettre d’information bimensuelle n°1, mai 2015. www.fnmji.fr. Gzil F. Le notaire face aux citoyens en situation de handicap cognitif. Repères pour la pratique. Paris : Fondation Médéric Alzheimer, en partenariat avec le Conseil supérieur du notariat. 2014. www.fondation-mederic-alzheimer.org/content/download/18763/83756/file/BrochureNotairesFondationMedericAlzheimer.pdf (texte intégral).