Conflits entre la famille et les professionnels : les facteurs nocifs

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
22 septembre 2015

Pour Philippe Thomas, médecin coordonnateur, psychiatre et gériatre de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Les Jardins de Cybèle à Poitiers, et Cyrille Hazif-Thomas, psychiatre et gériatre au service de psychogériatrie du CHU de Brest, la relation avec les familles, est « une école de vie pour les soignants », si ceux-ci acceptent toutefois de « prendre le risque » d’une telle relation. « De façon générale, les familles, clients cachés, ne sont pas suffisamment valorisées par les soignants dans leur rôle et leur engagement auprès de la personne âgée. Les familles regardent sans trop de difficultés les soins techniques de qualité, et admettent le rôle social et affectif des soignants. Elles ont confiance dans les jugements techniques des équipes, mais il n’est pas dit que celles-ci accordent réciproquement une place suffisante aux appréciations des proches des résidents. Les familles craignent la standardisation des attitudes et veulent avant tout des soins personnalisés incluant une certaine empathie. » Les représentations sont différentes : par exemple, familles et résidents perçoivent la tristesse et la dépression comme les signes d’une mauvaise qualité de vie, quand pour les soignants, les marqueurs en sont l’agitation, l’irritabilité et l’agressivité du résident. Quels sont les facteurs nocifs dans les relations entre les familles et les soignants ? « L’absence de réponse technique ou informative des professionnels ; l’escalade symétrique : soignants et familles veulent avoir raison coûte que coûte ; l’incapacité pour un soignant de définir qui fait quoi, les informations contradictoires provenant de plusieurs soignants ; le sentiment pour la famille de ne pas être compris ou même simplement entendu ; la difficulté de voir son parent négligé, mal habillé, sale, avec des chaussettes dépareillées, des chaussures inversées, mal coiffé ; le sentiment que le professionnel fait au minimum son travail uniquement pour gagner sa vie ; l’impression que le professionnel n’écoute pas la famille, n’entend pas les critiques : “vous n’êtes pas positifs, vous critiquez tout” ». Cependant, pour les auteurs, « tous les aidants familiaux ne sont pas des anges : les soignants doivent tenir compte du stress des familles et le contenir. »

Thomas P et Hazif-Thomas C. Prendre le risque d’investir les familles, une école de vie pour les soignants. NPG Neurol Psychiatr Gériatr 2015 ; 15(89) : 290–297. Octobre 2015. www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1627483015000082.