Comment former à la démarche palliative en maison de retraite

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
15 juin 2016

« La mort en EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) reste majoritairement un sujet tabou : il suffit pour s’en convaincre d’entendre comment sont organisés les départs de corps défunts dans les établissements », témoignent Jean-Marie Gomas, de l’unité Douleur chronique et soins palliatifs à l’hôpital Sainte-Périne (Assistance publique-Hôpitaux de Paris) et ses collègues, qui ont proposé aux EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) du groupe Domus VI un kit méthodologique sur la démarche palliative. « Il a été montré que la toilette mortuaire nécessitait une vraie formation et un soutien institutionnel. Aucun protocole, aucune procédure ne pourra jamais remplacer la nécessaire réflexion partagée (du directeur à l’agent d’entretien) sur ce sujet qui nous concerne tous ».  Mais « le préalable indispensable à toute démarche palliative est un travail des professionnels sur eux-mêmes, sur leurs pratiques, sur leurs compétences et peut-être même sur l’acceptation de leurs limites. Ce serait une hypocrisie et un grand danger pour les équipes de faire croire que toutes les situations palliatives (de plus en plus complexes) rencontrées en EHPAD peuvent être traitées sur place, compte tenu des moyens disponibles ? Là encore, les soignants ont à faire un effort pour “passer la main” à d’autres, sans se sentir “dépossédés” de “leur” résident. Il n’est pas facile d’accepter d’accompagner quelqu’un vers la mort quand on est immergé en permanence dans une culture du “guérir” à tout prix… » Montaigne (1533-1592) décrivait ainsi l’importance de l’accompagnement de la fin de vie  : « J’ai vu plusieurs mourants bien tristement assiégés de tout ce cérémonial, cette foule les étouffe. C’est contre le devoir et c’est un témoignage de peu d’affection et de peu de soin de vous laisser mourir en repos, l’un tourmente vos yeux, l’autre vos oreilles, l’autre la bouche. Il n’y a pas de sens ni de membre qu’on ne vous fracasse. Le cœur vous serre de pitié d’entendre les plaintes des amis, et de dépit peut-être d’entendre certaines plaintes feintes et masquées. Qui a toujours eu le cœur tendre, affaibli, l’a encore plus. Il lui faut en une si grande nécessité une main douce et conforme à son sentiment, pour le gratter justement là où il lui cuit, ou bien qu’on n’y touche pas du tout. Si nous avons besoin d’une sage-femme pour nous mettre au monde, nous avons bien besoin d’un homme encore plus sage pour nous en faire sortir. »

Gomas JM et al. Comment former à la démarche palliative en EHPAD ? Rev Gériatr 2016 ; 41(5) : 287-291. Mai 2016. www.revuedegeriatrie.fr. Montaigne M. in Essais, Livre III. Les Éditions de Londres.