Essais cliniques au stade très précoce : les blocages
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« Du côté des pays anglo-saxons, on se lance dans des essais cliniques pour trouver un médicament contre la maladie avec des personnes recrutées ne présentant aucun symptôme. Il y a une forte probabilité que ces dernières développent la maladie d’ici cinq à dix ans », a exposé le Pr Philippe Amouyel, directeur général de la Fondation de coopération scientifique Plan Alzheimer, à l’occasion des Assises de la recherche et de l’innovation sociale, pour relever le défi du vieillissement cognitif, organisées par la Fondation Médéric Alzheimer.Dans ces pays, les laboratoires et les institutions de santé s’intéressent notamment au cas de transmission héréditaire de la maladie d’Alzheimer (1.5 à 2% des cas). Les mutations génétiques à l’origine de la maladie pouvant être identifiées, il est donc possible de repérer les personnes ayant le plus de chance de développer la pathologie. Le laboratoire américain Eli Lilly a travaillé avec ce type de patients dans le cadre d’un essai clinique. Ce genre d’initiative pourrait représenter une « opportunité pour prévenir la pathologie », selon les Instituts nationaux de la santé américains.En France, ce type d’étude clinique est mal intégré par les autorités de santé : « nous faisons face à quelques blocages. Nous n’avons pas le droit de faire ces études-là », déplore le Pr Michel Clanet, neurologue et président du comité de suivi du plan Maladies neurodégénératives 2014-2019. Pour Philippe Amouyel, « faire des essais cliniques sur des patients qui ne sont pas encore diagnostiqués de la maladie est très compliqué voire irréalisable. Les raisons réglementaires qui justifient cela mériteraient plus de transparence, et un effort collectif de réflexion sur ces aspects. » Au Royaume-Uni, le Pr Julian Hughes et ses collègues, de l’Université de Bristol, publient une revue sur le consentement au diagnostic des états précliniques de la démence, un consentement problématique à « la divulgation de résultats indiquant un risque incertain pour une maladie alarmante. » Les chercheurs identifient quatre thèmes : la stigmatisation, les questions éthiques, le fardeau psychologique et le langage. Des questions émergentes concernent le sens, la médicalisation, les vertus et les valeurs.
www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/chimie-pharmacie/essais-cliniques-et-alzheimer-nous-faisons-face-a-quelques-blocages-655496.html, 7 mars 2017. Hughes JC et al. Consent for the diagnosis of preclinical dementia states : a review. Maturitas 2017 ; 98 : 30-34. Avril 2017. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28274325.