Terminologie et connotations (1)
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Armelle Debru, professeur d’histoire de la médecine à l’Université Paris-Descartes, et Michel Poncet, neuropsychiatre à l’Institut de la maladie d’Alzheimer au CHU La Timone de Marseille, commentent l’article de Daniel George, intitulé « surmonter la mort sociale de la démence par le langage », publié dans la revue médicale The Lancet en août 2010, et qui montre combien les représentations négatives liées à la maladie d’Alzheimer sont étroitement tributaires du langage (déficits, altération de soi, fardeau pour les proches, défaite), et contribuent à une dévalorisation pouvant aboutir à une « mort sociale ».
Pour Armelle Debru, « notre terme médical de démence plonge indéniablement ses racines dans la langue courante. Contrairement aux psychiatres qui ont éliminé de leur langue médicale des termes à la fois ambigus et stigmatisants, comme idiot, crétin ou insensé, nous avons gardé démence et ses connotations persistantes. Elles risquent de s’infiltrer insidieusement sous le vernis de la technicité, qui se craquelle sans qu’on y prenne garde. Pourtant, à côté du sens de folie donné par tous les dictionnaires, le mot démence a une histoire proprement médicale.
Comme catégorie nosologique (classification des maladies), il se développe en France au cours du dix-neuvième siècle. Mais l’impulsion décisive vient du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM), outil de référence universellement adopté. On en vient à oublier que dementia, qui conserve en anglais sa forme latine, n’y fait pas partie de la langue courante et garde pour cela distance et neutralité ».
EREMA. Actualités n°1, Décembre 2010. www.espace-ethique-alzheimer.org. George DR. Overcoming the social death of dementia through language. Lancet 2010 ; 376(9741) : 586-587. 21 août 2010. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20734467.