Suicide des personnes âgées : lever le tabou

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
10 juin 2011

Si le suicide des jeunes fait l’objet de toutes les attentions, celui des seniors est encore largement ignoré. Il est pourtant dix fois plus fréquent chez les personnes âgées de quatre-vingt-cinq ans et plus que chez les jeunes âgés de quinze à vingt-quatre ans. En 2008, 28% des 2950 suicides recensés en France concernaient des personnes âgées de plus de soixante-cinq ans, alors qu’elles ne représentent que 16% de la population. Pascal Champvert, président de l’AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées) invoque « l’âgisme », le rejet par la société de ses aînés : « dans un pays qui considère que le vieux ne valent rien, la personne âgée se vit comme un poids et se sent coupable du prix qu’elle lui coûte. Nous vivons dans une société suicidogène ». Dans les services à domicile ou les établissements, des actions de sensibilisation des professionnels à la détresse psychologique des personnes âgées se développent progressivement. La « crise suicidaire », cette période de quelques jours à quelques semaines où la personne pense à mettre fin à ses jours comme solution à des souffrances insoutenables, est plus difficile à détecter chez les personnes âgées. En se suicidant, la personne âgée ne fait-elle pas une demande d’euthanasie ? Non, répond Jean-Louis Terra, professeur de psychiatrie à l’Université Lyon-I : « la crise suicidaire correspond à un mal-être psychique, alors que dans le cas d’une demande d’euthanasie, c’est le corps qui abandonne la personne. La perspective de cette souffrance physique à plus ou moins long terme est insoutenable ». Le début d’une maladie démentielle ou encore l’apparition des premiers symptômes d’une nouvelle affection représente un moment à risque particulier. « Cela s’accompagne toujours d’une souffrance psychique, qui est, au-delà de la solitude ou du veuvage, le véritable enjeu », explique Alain Sagne, psycho-gérontologue au CHU de Saint-Etienne. « Dès que le risque n’est plus ignoré, c’est déjà protecteur. Les personnes qui entourent la personne âgée passeront la voir plus souvent », explique Pierre-Olivier Treille, psychiatre à la cellule de prévention des situations de détresse dans l’Ain.

Actualités sociales hebdomadaires, 10 juin 2011.