Médicaments spécifiques : quel coût pour quelle efficacité ? (2)
Recherche
Deux syndicats de médecins généralistes, MG France et l’Union généraliste, dénoncent le remboursement par la Sécurité sociale de traitements « inefficaces, voire dangereux, contre la maladie d’Alzheimer ». « La revue Prescrire le dénonce depuis des années, mais nous profitons de l’effet Mediator pour alerter l’opinion publique. Dans le contexte actuel, nous pouvons être entendus et, peut-être, faire bouger les choses », espère le Dr Claude Bronner, co-président de l’Union généraliste. « Tous les essais cliniques ont démontré que les médicaments anti-Alzheimer n’amélioraient pas de façon significative l’état de santé des patients », résume de son côté le Dr Claude Leicher, président de MG France, citant une étude de 2005 sur l’un des produits, montrant que le traitement « avait des effets secondaires dangereux au-delà de six mois, entraînant une surmortalité des patients », à la suite d’accidents cardio-vasculaires. Sur France Culture, lors de l’émission Science publique du 28 janvier 2011, il s’interroge : « pourquoi continue-t-on à mettre systématiquement des personnes de plus de quatre-vingts ans qui ne demandent rien à personne sous des médicaments dont le service médical rendu est considéré comme nul et dont la toxicité commence à émerger ? Il y a beaucoup plus besoin d’un accompagnement des patients que d’une prescription médicamenteuse. Il faut ajouter que la prescription initiale de ces médicaments est réservée à quelques spécialistes dont les neurologues et les gériatres ce nous pose, à nous les généralistes, beaucoup de problèmes. Quand nous, médecins traitants, commençons à voir une personne commençant à avoir un déclin dans ses capacités cognitives et relationnelles, la famille nous interroge. Nous souhaitons que l’on ne mette pas ces patients sous traitement. Mais que se passe-t-il ? On fait un bilan de mémoire et on entre dans une chaîne où nous, médecins généralistes traitants, n’arrivons plus à sortir. Car mettre en route un traitement, c’est lourd ; mais l’arrêter c’est encore plus lourd. Nous avons des patients qui reviennent de l’hôpital avec des prescriptions de médicaments. Nous disons que ce n’est pas utile, pas efficace et que cela peut même être dangereux. Mais il est très difficile de convaincre que le rapport bénéfice/risque n’est pas en faveur de la prescription faite par un spécialiste. (…) Nous devenons prisonniers de la prescription des spécialistes parce que les patients eux-mêmes sont devenus prisonniers de ces prescriptions. Il faut retirer ces médicaments du marché ».
www.slate.fr, 17 février 2011.www.franceculture.com/emission-science-publique-comment-les-medecins-prescrivent-ils-les-medicaments-2011-01-28.html, 28 janvier 2011.