Médicaments spécifiques : réévaluation anticipée du rapport bénéfice-risque (1)
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Après le Mediator, la prochaine « grosse affaire » sur le médicament pourrait-elle concerner les médicaments spécifiques de la maladie d’Alzheimer ? s’interroge Pierre Bienvault, de La Croix. La polémique médiatique est enclenchée. La revue indépendante Prescrire estimait en 2008 que l’Aricept avait un effet « modeste et transitoire » de quelques mois chez environ 10% des patients, l’efficacité des trois autres médicaments n’étant pas meilleure. « Affirmer que ces thérapeutiques ne servent à rien ou sont même dangereuses risque de créer chez les patients et leurs proches une inquiétude tout à fait injustifiée », répond le docteur Jean-Marie Vetel, gériatre à l’hôpital du Mans et membre de la Commission de la transparence de la Haute Autorité de santé (HAS). Le Professeur Jean-Marc Orgogozo, chef du pôle de neurosciences du CHU de Bordeaux, reconnaît que ces traitements ne modifient pas l’évolution de la maladie sur le long terme, « mais ils peuvent avoir un effet intéressant chez certains patients à un stade léger à modéré ». La Croix note un possible conflit d’intérêt, le Pr Orgogozo ayant participé, pour le compte des fabricants, au montage des dossiers d’enregistrement du Reminyl et de l’Ebixa. Luc Buée, directeur de l’unité INSERM U 815 (maladies neurodégénératives et mort neuronale) au CHU de Lille, ajoute : « chez un peu moins de la moitié des malades, les médicaments permettent de ralentir la détérioration cognitive sans l’améliorer. Dans certains cas, cela peut retarder de six mois l’entrée dans la dépendance ». En termes de risque, la HAS estimait en 2007 que « ces médicaments exposent à peu d’effets indésirables ». La revue Prescrire, en 2008, avait un avis opposé : « tous ces médicaments exposent à de nombreuses interactions qui augmentent les risques d’effets indésirables et parfois de décès » ; son directeur, le Dr Bruno Toussaint, affirmait sur France Culture en janvier 2011, que ces médicaments « sont dangereux du point de vue cardio-vasculaire », avis contesté par le Dr Vetel, qui assure : « ces médicaments sont sûrs et globalement très bien tolérés », et par le Pr Orgogozo : « il n’y a aucune donnée nouvelle permettant de dire qu’ils ont des effets secondaires graves ».
www.la-croix.fr, Mediscoop, 2 mars 2011. www.notretemps.com, 3 mars 2011. www.agevillagepro.com, 7 mars 2011.