Diagnostic de la maladie d’Alzheimer : nouvelles recommandations américaines (3)
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Quelles réactions des associations de familles ? Aux Etats-Unis, l’Association Alzheimer est co-productrice des recommandations, avec l’Institut national du vieillissement (NIA). Elle ne peut donc que se féliciter de ces recommandations. Un diagnostic précoce, pour quoi faire ? William Thies, directeur médical de l’Association Alzheimer, explique que le but des recommandations est d’ « étendre le cadre de notre capacité de recherche sur le sujet et éventuellement trouver le traitement qui sera nécessaire pour éviter l’épidémie de maladie d’Alzheimer qui nous attend dans les quarante prochaines années ». L’accès au diagnostic précoce est également évoqué dans une proposition de loi du représentant démocrate du Massachusetts Edward Markey : « souvent, les membres de la famille détectent des symptômes chez leur proche, mais il peut se passer des années avant qu’un diagnostic soit posé et que les familles comprennent quelles sont les ressources à leur disposition ». Une affirmation confirmée par des chercheurs de l’Ohio State University (Gibson AK et Anderson KA) montrant, dans une étude descriptive auprès de 106 aidants familiaux, que le diagnostic reste difficile : 58% des diagnostics « définitifs » sont établis après une période supérieure à trois mois. Dans 12% des cas, le délai d’attente est d’au moins un an. Les aidants déclarent ne pas avoir eu d’information adéquate concernant la maladie ou les dispositifs de proximité, ni au moment du diagnostic, ni un an plus tard.
Au Canada, les nouvelles recommandations américaines sur le diagnostic de la démence inquiètent : Debbie Benczkowski, présidente de la société Alzheimer canadienne, prévient : « le Canada devrait réfléchir à deux fois avant de suivre les nouvelles recommandations médicales américaines permettant de détecter des signes avant-coureurs de la maladie d’Alzheimer chez certains patients dix ans plus tôt que ne le permettent les tests diagnostiques actuels. Cette accélération des critères américains peut étiqueter et stigmatiser certaines personnes comme atteintes de la maladie d’Alzheimer alors qu’elles ne développeront jamais la maladie. Le diagnostic inquiètera au plus haut point des patients qui ne sauront pas s’ils sont condamnés (doomed) à développer la maladie ou non ». Pour la société Alzheimer canadienne, « cette sorte de diagnostic pré-symptomatique, en l’absence de tout traitement, pose des questions éthiques qui méritent un examen très attentif ». Les avantages et les inconvénients du diagnostic précoce feront l’objet d’une vaste campagne de communication auprès des chercheurs et des différentes parties prenantes.
Pour Jean Georges, directeur exécutif d’Alzheimer Europe, un diagnostic précoce signifie que davantage de personnes seront en mesure de bénéficier du traitement et du soutien disponibles. Une enquête d’opinion sur la valeur du diagnostic précoce a été menée par Alzheimer Europe en France, Allemagne, Pologne, Espagne et Etats-Unis auprès de 2 678 personnes. Les résultats devraient être communiqués en juillet 2011.
The Star, 25 avril 2011. Alzheimer Europe Newsletter, avril 2011. Family Caregiver Alliance, 9 mai 2011. Gibson AK et Anderson KA. Difficult diagnoses : family caregivers’ experiences during and following the diagnosis process for dementia.Am J Alzheimers Dis Other Demen 2011; 26(3): 212-217. Mai 2011.
http://aja.sagepub.com/content/26/3/212.abstract.