Après le décès de la personne malade, quelle identité pour l’aidant ? (2)
Société inclusive
Que s’est-il passé depuis trois mois ? Tout d’abord, les cieux ne se sont pas ouverts pour m’octroyer une transformation de ma personnalité. J’ai toujours été introvertie. Mais des années dédiées à l’aide et l’isolement forcé qui en a découlé m’ont changée (en partie en raison de la nature du travail d’aidant, et en partie parce que les gens ne comprennent pas). Ces années ont ajouté un bouclier dur et douloureusement solitaire (a hard, painfully reclusive shield) à ma personnalité. Je ne pouvais plus supporter des interactions en face-à-face plus d’une ou deux fois par semaine. Je n’aimais pas ce bouclier, qui me semblait rigide et restrictif. Mais je ne pouvais pas dénier sa présence. Je veux me sentir de nouveau à l’aise dans les interactions, comme je l’étais, disons il y a vingt ans. Mais le relâchement (loosening) de la structure et des liens, et l’ouverture de « possibilités » liées à la mort de ma mère ne m’ont pas encore ramenée à la situation d’autrefois. Je continue à me sentir épuisée à chaque effort que je fais pour m’ouvrir lorsque je suis en face-à-face avec quelqu’un, ou quand je sors de mon chemin pour rencontrer des gens. Première leçon pour moi : à moins d’un événement majeur, il faut faire un effort pour inverser des changements de personnalité ». Swapna Kishore ne peut pas s’imaginer émotionnellement dans un statut d’ « ex-aidant », d’ « ancienne élève de l’école des aidants où les coups sont durs et où les cœurs se brisent ». Elle s’interroge : « Est-il vrai qu’une fois qu’on a été aidant, on reste toujours aidant ? ». Un jour, en discutant avec un ami, tout s’est soudainement éclairé : « il y a d’autres aidants, qui poursuivent leur route, et qui peuvent toujours apprécier un espace de discussion ouvert. Pour eux, je suis un compagnon de voyage. Mon identité m’apparaît maintenant plus claire. Peut-être suis-je comme un coureur de marathon qui, après avoir franchi la ligne d’arrivée, revient auprès des aidants qui continuent de courir, pour leur donner le rythme et leur tenir compagnie ».
http://swapnawrites.wordpress.com/, 1er juillet 2012.