Euthanasie : un enjeu électoral (4)
Droit des personnes malades
L’euthanasie est-elle une urgence électorale ? C’était le thème de la rencontre organisée le 12 mars 2012 à l’assemblée nationale à l’initiative du collectif Plus digne la Vie, présidée par Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique médicale à l’Université Paris-Sud. L’objet de cette rencontre n’était pas de débattre pour ou contre l’euthanasie, mais « d’honorer la dimension de la vie jusqu’à son terme » à travers une pluralité de grilles de lecture et d’analyse du débat, et de « témoigner de l’attention à des gens qui n’ont plus le sentiment que la société leur donne le sentiment d’exister ». Partout en France, des débats citoyens de proximité sont organisés par l’association JAMALV (Jusqu’à la mort, accompagner la vie), qui a élaboré, avec l’expertise du Dr Bernard Devalois, chef du service de l’unité de soins palliatifs à l’hôpital de Pontoise, un kit d’outils pédagogiques, dont un DVD réalisé par Frédérique Chaudier (kit disponible sur le site de l’association JAMALV et celui de la société français de soins palliatifs).
Les Pays-Bas, puis la Belgique, ont été les premiers pays à légaliser l’euthanasie en 2002. Quel bilan ? Plus de quatre mille personnes dans ces deux pays ont terminé leur vie de cette façon, principalement à la suite d’un cancer. Aux Pays-Bas, l’euthanasie est autorisée lorsque le patient en fait la demande en pleine possession de ses capacités mentales et qu’il subit des souffrances « insupportables et interminables » dues à une maladie incurable. Les médecins accèdent à la demande dans environ un tiers des cas. Toutefois, leur expérience reste limitée : un médecin néerlandais est confronté en moyenne à une demande « sérieuse » d’euthanasie une fois tous les trois ans. « Cela a pour effet que parfois, par manque de connaissance, il peuvent mal évaluer une demande », souligne la société royale des médecins néerlandais (KNMG). Depuis avril 2002, « le texte de loi n’a pas changé, ce qui a évolué, c’est la manière dont les médecins le comprennent. » En 2011, pour la première fois, une euthanasie a été pratiquée sur une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer à un stade avancé. « Cela aurait été inimaginable en 2002 », souligne l’association pour une fin de vie volontaire (NVVE-Nederlandse Vereniging voor een Vrijwillig Levenseinde). 80% des personnes décident de mourir à leur domicile. Depuis le 1er mars 2012, la NVVE a mis en place six équipes mobiles composées d’un médecin et d’une infirmière se déplaçant au domicile de personnes souhaitant mourir, pour pratiquer des euthanasies contre l’avis du médecin traitant. En Belgique, la loi du 28 mai 2002 avait été adoptée pour « sortir l’euthanasie de la clandestinité ». Les décès par euthanasie représentent 1% des décès. Pour des raisons culturelles et de proximité avec les Pays-Bas, 81% des personnes ayant recours à l’euthanasie sont flamandes. Pour l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) belge, « la loi a été positive car elle a permis de très grands changements dans les relations patients-médecins. De nombreux tabous sur la fin de vie ont pu être levés ; elle a aussi permis aux familles de mieux préparer et d’accepter la mort de leur proche. On a vu se mettre en place des rituels, comme les cérémonies de l’au-revoir, le dernier repas… »
www.agevillagepro.com, 27 mars 2012. Libération, 30 mars 2012. Le Monde, 25 mars 2012. Collectif Plus digne la Vie. Colloque du 12 mars 2012 à l’Assemblée nationale : L’euthanasie est-elle une urgence électorale ?http://plusdignelavie.com/?p=1859 (vidéos). Légalisation de l’euthanasie en Belgique : un bilan. http://plusdignelavie.com/?p=1891 (texte intégral).