Services à la personne : quelle croissance, quel financement ? (1)

Droit des personnes malades

Date de rédaction :
23 novembre 2012

« L’essor du secteur, amorcé en 2005, s’est essoufflé. Le travail au noir a reculé et la professionnalisation a commencé ; mais le changement d’échelle n’a pas eu lieu. Pourtant, l’activité est condamnée à grandir. D’ici dix ans, les moins de vingt ans et les plus de soixante-dix ans représenteront vingt-six millions de personnes susceptibles d’avoir recours à l’aide à domicile », écrit Éric Schott, du Monde. La population des personnes âgées de moins de vingt ans (seize à dix-sept millions d’individus) devrait rester stable à l’horizon 2050, mais celle des personnes âgées de plus de soixante-dix ans (huit millions de personnes), en croissance annuelle de moins de 1% aujourd’hui, devrait s’accroître de 3% par an en 2017, précise Hippolyte d’Albis, économiste et démographe de l’École d’économie de Paris. En termes de marché, la marge de développement existe. Le secteur des services à la personne représente 1.1% du PIB (produit intérieur brut, mesure de la richesse nationale) en France, contre 2% au Royaume-Uni. Dans son « Paquet Emploi » 2012, La Commission européenne considère les services à la personne comme l’un des secteurs « dont le potentiel de participation à une croissance génératrice d’emplois est particulièrement élevée ». Mais en France, le secteur des services à la personne rencontre trois obstacles : financier, managérial et structurel, résume Eric Schott. Financièrement, le marché est fragile, car concurrencé en permanence par le travail au noir. Aujourd’hui, aucune entreprise ne dépasse 3% de marge. Cette faiblesse structurelle de la marge financière explique aussi la fragilité des associations et des entreprises, qui ne peuvent garantir une progression des salaires et de la professionnalisation des salariés. Les rémunérations ne peuvent évoluer très au-dessus du SMIC, sauf à risquer de voir la clientèle retourner au marché informel. Le second défi est le management. Un niveau de qualification n’est actuellement exigé que pour les services destinés aux publics fragiles, dans un organisme agréé, mais pas au domicile de l’employeur, où il ne peut pas y avoir de contrôle de l’inspection du travail. « Le travail de l’aide à domicile, souvent apparenté à du travail domestique, nécessite également des compétences techniques et relationnelles particulières pour gérer efficacement des employeurs et structures multiples, la solitude de la personne âgée, la relation avec la famille, parfois éloignée, le tout sur des rythmes de travail hachés ». Le troisième défi est celui de la structure : entreprises, associations ou emploi direct ? « On ne peut fermer les yeux sur le fait que ce secteur, qui couvre à la fois des services de confort et des métiers d’aide sociale, ne se passe toujours pas de financements publics », écrit Éric Schott. Pour François-Xavier Devetter, maître de conférences en sciences économiques à l’Université de Lille-1, « le coût d’un emploi de services à la personne, toutes structures confondues, est aujourd’hui de cinquante mille euros par an ». Selon lui, « il faut probablement restructurer le secteur et revoir la liste des services à la personne, afin de réserver les subventions à l’aide aux enfants et aux personnes dépendantes ».

Le Monde, 27 novembre 2012. Commission européenne, 18 avril 2012.

http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=fr&catId=101&newsId=1270&furtherNews=yes