Est-on libre en maison de retraite ? (1)

Droit des personnes malades

Date de rédaction :
15 février 2013

« Les maisons de retraite sont-elles des lieux d’enfermement ? Si elle peut paraître choquante », écrit Laëtitia Clavreul, du Monde, « la question est directement posée par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Claude Delarue », qui publie son cinquième rapport annuel depuis 2008. Il avait en fait déposé un avant-projet de loi entre les mains du Premier ministre Jean-Marc Ayrault en mai 2012 pour étendre les compétences du contrôle général aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Cette demande étant restée sans réponse est aujourd’hui officialisée au grand jour, alors qu’est relancé le débat sur l’équilibre entre sécurité et liberté dans les maisons de retraite. Jean-Claude Delarue avance trois arguments. Tout d’abord, les personnes âgées dépendantes sont, en institution spécialisée, de fait privées de leur liberté ; les EHPAD ne sont évidemment pas des lieux de privation de liberté assimilables à ceux qui, par nature, ont été créés comme lieux de captivité. En revanche, parce qu’ils accueillent des populations dépendantes, ces EHPAD sont contraints d’assurer leur sécurité. Pour ce faire, certains établissements sont fermés ; la faculté d’aller et de venir n’est alors que théorique. Or, si certaines personnes âgées n’y restent que pour des durées de quelques semaines, d’autres y séjournent des années. En théorie, il n’existe en EHPAD ni obstacles à l’entrée, ni empêchement à la sortie. Mais en pratique de nombreux établissements, pour la protection des personnes âgées elles-mêmes, sont fermés (on pense ici à certaines unités dites “Alzheimer” par exemple). « La privation de liberté n’est ici pas de droit mais de fait et peut donc entrer dans le champ de compétences du contrôle général ». Le second argument avancé par Jean-Claude Delarue est que « la protection des personnes âgées en perte d’autonomie est une exigence humaine. L’état des personnes âgées dépendantes tient avant tout à leur âge et non pas à quelque fait dont elles seraient responsables et qui les auraient conduites à enfreindre la loi ou à menacer l’ordre public. La perte d’autonomie consécutive au grand âge crée une dépendance qui ne peut se résumer aux seuls critères physiques. La détresse psychique due à un affaiblissement de la capacité de consentement rend ces populations d’autant plus vulnérables. C’est donc souvent pour les protéger d’elles-mêmes que ces personnes âgées dépendantes sont enfermées. Cette privation de liberté est une réalité humaine qui ne peut être ignorée. »

Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Rapport d’activité 2012. Février 2013.www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2013/02/RA-2012_DP-entier_DEF.pdf.