Obligation de sécurité : responsabilité de l’établissement (2)
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Lorsqu’une personne âgée hébergée en vertu d’un contrat est victime d’un dommage, c’est la responsabilité civile contractuelle de l’établissement qui doit être recherchée, responsabilité qui ne joue que si ce dernier a commis une faute, rappelle Sophie André, d’Actualités sociales hebdomadaires, dans un cahier juridique consacré aux récentes décisions de jurisprudence concernant les EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Quant à la responsabilité pénale, en cas de décès accidentel d’un résident dû aux installations de l’établissement, elle n’est pas automatique. Ainsi, dans une décision du 4 octobre 2011, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’il n’y avait pas lieu de poursuivre pénalement un établissement dans lequel l’une de ses résidentes, atteinte de la maladie d’Alzheimer, était décédée des suites de brûlures dues à la température trop élevée de l’eau de sa douche, en avançant les éléments suivants : « compte tenu de la date d’installation des appareils [de robinetterie], les dispositions de l’arrêté du 30 novembre 2005 destinées à éviter les risques de brûlures et imposant une température de l’eau inférieure à 50°C aux points de puisage n’étaient pas applicables ; qu’ainsi, il n’existe pas de manquement à une obligation de sécurité résultant d’une disposition réglementaire ». Ensuite, s’agissant du reproche portant sur « la discontinuité dans la surveillance de nuit », la chambre de l’instruction de la Cour d’appel observe que, « au moment de l’accident vers 19 heures, des infirmières, tant libérales que salariées, étaient présentes, outre la surveillance de nuit, [et] que trois personnes se sont portées au secours de l’intéressée, lui ont prodigué les premiers soins et ont appelé les secours. Ainsi, selon elle, le problème de la présence d’un seul veilleur de nuit entre 19 heures et 21 h 45 n’a eu aucune incidence ». La chambre de l’instruction écarte également l’accusation de « surveillance insuffisante, notamment à l’étage où se trouvait la chambre » de la résidente décédée, jugeant qu’une surveillance permanente n’est pas possible. D’après elle, « la nécessité d’assurer la sécurité et la protection des personnes dépendantes se heurte […] à l’impératif tout aussi légitime de préserver leur dignité et leur intimité ». Dès lors, elle retient l’argument de la direction de l’établissement selon lequel il n’est pas « envisageable de laisser les portes des chambres ouvertes car la chambre représente en quelque sorte le domicile des pensionnaires qui doivent se sentir comme chez eux [et] que ni une surveillance permanente ni encore moins des moyens de contention ne sont envisageables (…). Le fait que chaque chambre soit équipée de sanitaires et d’une douche constitue non seulement un progrès mais surtout une obligation pour l’établissement et ne peut lui être reproché », conclut la juridiction. La chambre de l’instruction de la Cour d’appel met également de côté la critique sur l’absence d’un système d’alarme, considérant notamment que, pour être efficace, un tel système suppose que la personne âgée soit en état de le comprendre, « ce qui n’est pas évident pour des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ».
Actualités sociales hebdomadaires, 6 avril 2012. Cass crim 2011. Requête n°11-81699. 4 octobre 2011. www.juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20111004-1181699 (texte intégral).