« Croire en la mort comme seule et totale rupture du lien social (environnemental, affectif), c'est croire en la vie humaine »

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
16 juillet 2013

« Analyser et comprendre l’interpénétration des souffrances plurielles, celles qui sont nées de l’angoisse et du désespoir de l’entrée en institution, du deuil d’un corps amoindri et d’un esprit émietté — du sien ou de celui de l’être que l’on aime —, d’une communication estimée impossible, permet de rétablir ou de développer une permanence de liens affectifs et sociaux. Même dément, un patient est une personne. Le regard que “je” lui porte lui confère une identité. Il y a perte de communication lorsqu’il y a perte de reconnaissance de l’humain chez le dément qui nous propose de découvrir et d’expérimenter d’autres vecteurs de communication, même déconcertants », écrivait en 2005 Bernadette Le Nouvel, récemment décédée. Psychologue clinicienne à l’Hôpital Broca de Paris, membre du groupe de recherche et de réflexion Éthique et vieillesse de l’Espace éthique de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, elle avait décidé de finir sa vie auprès des pauvres de Haïti. Catherine Ollivet, présidente de France Alzheimer 93 et conseiller de l’Espace éthique d’Ile-de-France, lui rend un hommage posthume sur le site de l’EREMA en publiant ce texte emblématique. « Se questionner sur les limites jusqu’où l’on peut communiquer, c’est se questionner sur les limites de notre humanité », écrivait Bernadette Le Nouvel. « Croire en la mort comme seule et totale rupture du lien social (environnemental, affectif), c’est croire en la vie humaine et son expression en multiples métamorphoses. L’accompagnement à la mort est communément admis et développé comme une nécessité. Il conviendrait cependant de réfléchir également et collectivement à l’accompagnement à la vie, en prenant en compte les déménagements successifs d’une personne âgée malade par exemple comme autant de crises, de ruptures générant tensions et conflits. Ils peuvent revêtir les caractéristiques du deuil, réactiver des deuils antérieurs, voire être autant de deuils à répétition. Cet accompagnement particulier porte un intérêt individuel (patient) et collectif (patient/famille/soignants), et peut jouer un rôle de prévention favorisant une meilleure qualité de soins et de vie pour tous. »

Le Nouvel B. Séjour en institution gériatrique, douleurs plurielles et accompagnement à la vie. Espace national de réflexion éthique sur la maladie d’Alzheimer. Newsletter n°20, septembre 2013. www.espace-ethique-alzheimer.org/newsletter/newsletter20.html.