Faut-il faire un diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer ? (2)
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Qu’en pensent les neurologues, qui voient souvent arriver les patients à un stade tardif ? Pour le Professeur Didier Hannequin, responsable du Centre national de référence des malades Alzheimer jeunes au CHU de Rouen, « l’annonce est toujours un coup de massue. Mais dans bien des cas, il y a aussi une sorte de soulagement de pouvoir enfin mettre un nom sur ce qui se passe. Très souvent, les familles disent que le diagnostic a été trop lent à venir alors que, pour eux, la maladie était devenue évidente », souligne Catherine Ollivet, présidente de l’association France Alzheimer 93 et membre de l’EREMA. Pour le Professeur Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de santé, « tout diagnostic doit entraîner un accompagnement et une prise en charge médico-sociale. Intervenir tôt permet d’assurer une meilleure qualité de vie aux patients ». Pour Jean-Marie Vetel, gériatre au centre hospitalier du Mans, « on ne peut pas retarder un diagnostic sous prétexte qu’il n’existe pas de médicament efficace. La prise en charge d’un Alzheimer ne se résume pas aux médicaments. Et c’est bien le diagnostic qui permet à la personne d’entrer dans un système de prise en charge globale, avec de la stimulation cognitive, un accueil de jour, des mesures d’aide ou de formation pour les aidants familiaux… « . Ce débat concerne aussi la conception des essais cliniques : le diagnostic au stade présymptomatique à l’aide de biomarqueurs permettrait de sélectionner, pour tester l’effet de nouvelles molécules, des personnes aujourd’hui en bonne santé mais qui auront, dans dix à quinze ans, une très grande probabilité de développer une maladie d’Alzheimer. En effet, explique le Professeur Philippe Amouyel, directeur général de la Fondation Plan Alzheimer, « aujourd’hui, les nouveaux médicaments sont testés au stade de la démence, à un moment où les capacités de récupération du cerveau sont sans doute déjà épuisées », d’où l’intérêt de les tester plus tôt. Si la demande d’information et de transparence est très forte, au nom de quoi la médecine peut-elle retenir une partie de l’information ? Mais en même temps, doit-elle tout dire et tout le temps ? s’interroge pour sa part le Dr Perrine Marzac, coordinatrice de l’espace éthique méditerranéen à l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille.
La Croix, 18 septembre 2012.